Cuapa : un message de paix

Cuapa est situé dans le diocèse de Juigalpa.

Dans l’histoire récente du Nicaragua

Les apparitions accompagnent et font explicitement référence à la situation du pays, le "tremblement de terre", les "autres souffrances" (liée aux deux soulèvements populaires successifs), les "martyrs" de la foi (au temps de la propagande marxiste), le risque de "guerre mondiale" (le contexte de la guerre froide), et enfin, "la paix" et la réconciliation nationale. C'est pourquoi nous donnons ces repères historiques :

En 1972, Somoza, chef de la Garde nationale, profita de la situation catastrophique créée par un tremblement de terre pour promulguer la loi martiale et prendre le contrôle du pays. Chargé d'acheminer l'aide internationale reçue après le tremblement de terre, il s'en appropria la majorité.

En juillet 1979, un soulèvement populaire chasse, au prix de 40 000 morts, le dictateur Anastasio Somoza Debayle, dernier de la dynastie des Somoza.

La coalition qui prend le pouvoir entraîne le pays dans une autre dérive dictatoriale, avec Daniel Ortega, marxiste et rallié au bloc de l’Est.

Une partie des populations locales, les « contras » (à la fois des indiens et des ex-somozistes), avec l’aide des USA (scandale de l’Irangate), s'opposent aux projets du président notamment sur la collectivisation des terres ou la conscription obligatoire et le pays est ensanglanté par une guerre civile qui fait 29.000 morts.

Le retour à la démocratie advient en 1990. En 2006, Daniel Ortega se rapproche de nouveau de l’Eglise catholique, il est élu président en 2007 et choisit pour vice-président un ancien « contras ».

C’est dans ce contexte que prend toute sa force le message de l’apparition présumée.

Les premières apparitions

Le 15 avril 1980, vers vingt heures, dans une vallée du Chontales, un paysan célibataire, Bernardo Martinez, la quarantaine, membre d’une communauté néo-catéchuménale « aperçoit une lumière extraordinaire » près d’une ancienne chapelle.

Le 7 mai suivant, Bernardo pêche dans un endroit isolé de la vallée de Cuapa et « Elle » lui apparaît : « Son vêtement était blanc et long. Elle avait une ceinture bleue sur les hanches et des manches longues. Un manteau couleur crème pâle la couvrait avec une broderie d’or tout du long. Elle avait les mains jointes sur la poitrine. Elle ressemblait à l’image de la Vierge de Fatima [...]. Elle étendit les bras, et de ses mains sortirent des rayons de lumière plus forts que ceux du soleil [...]. Elle était un peu en hauteur, et les rayons qui sortaient de ses mains inondaient ma poitrine. » Bernardo lui demande son nom.

L’apparition le lui révèle : Marie. “Je viens du ciel, je suis la Mère de Jésus”, m’a-t-Elle révélé, d’une voix si douce que je n’avais jamais entendu pareille voix d’aucune femme, ni d’aucune personne.

« “Que voulez-vous ? – Que vous priiez le chapelet tous les jours ! Aimez-vous. Accomplissez vos devoirs. Faites la paix.” »

Puis Elle poursuit : « Le Nicaragua a beaucoup souffert depuis le tremblement de terre*. Et il est menacé de souffrir plus encore. Vous continuerez à souffrir si vous ne changez pas [...]. Prie, prie, mon fils, prie le chapelet pour le monde entier. Si vous ne changez pas, la venue d’une troisième guerre mondiale est proche. »

Bernardo constate alors que l’apparition s’en va : « Elle leva les bras au ciel, comme la statue de l’Assomption que j’ai vue tant de fois dans la cathédrale de Juigalpa. Elle tourna les yeux en haut vers le ciel, et le nuage qui la soutenait l’éleva. Elle était comme dans une niche de lumière, et à une certaine distance, Elle disparut de ma vue. »

Une vision du paradis

Dans la nuit du 8 au 9 juin 1980, Bernardo voit la Vierge dans son sommeil.

« Elle m’a dit : “Regarde le ciel.”

Je vis un grand groupe de personnes habillées de blanc qui cheminaient vers l’orient. Elles allaient, toutes baignées de clarté et de joie, elles chantaient. Je les entendais, mais je ne comprenais pas les paroles qu’elles prononçaient [...]. Les corps irradiaient de lumière.

J’entendis qu’Elle me disait : "Regarde, voici les premières communautés des débuts du christianisme. Ce sont les premiers catéchumènes. Beaucoup d’entre eux furent des martyrs. Voulez-vous être des martyrs ? Aimerais-tu être un martyr ?"

Ensuite, je vis un autre groupe. Les gens étaient aussi habillés de blanc avec des chapelets lumineux dans les mains. Les grains étaient très blancs et jetaient des feux multicolores. L’un d’eux avait un grand livre ouvert... »

Bernardo indique qu’il aperçut ensuite un autre groupe de personnes vêtues comme des franciscains puis un dernier, de gens habillés « tout comme nous ».

« Je t’ai montré la Gloire du Seigneur et c’est cela que vous allez acquérir si vous obéissez au Seigneur, à Sa Parole, si vous persévérez dans la prière du saint rosaire et mettez en pratique la Parole de Dieu », poursuit l’apparition.

Une apparition et un signe que tous ont vu

Une dernière apparition a lieu le 13 octobre 1980, vers quinze heures, en présence d’une cinquantaine de fidèles.

« Soudain, il se forma un grand cercle de lumière sur la terre. Tous, sans exception, le virent. C’était comme un seul rayon qui tombait et marquait ce cercle lumineux sur le sol. La lumière venait d’en haut. La lumière venait comme d’un foyer, et, en arrivant sur le sol, se trouvait répandue [...]. Je regardai vers le haut et vis que s’était formé aussi un cercle dans le ciel [...]. Ce cercle irradiait des couleurs », commente Bernardo.

Deux éclairs précèdent l’apparition, à qui Bernardo demande de se laisser voir par tous. La Vierge refuse et se met à pleurer : « C’est la dureté de votre cœur. Dites le chapelet, méditez les mystères de Dieu. Aimez-vous les uns les autres. Pardonnez-vous. Ne demandez pas seulement la paix sans la faire. On me demande des choses sans importance. Demandez la foi pour avoir la force de supporter chacun votre croix. Les souffrances de ce monde ne peuvent pas vous être enlevées [...]. La vie est ainsi. Je suis avec vous, bien que vous ne me voyiez pas. Je suis votre Mère à tous, pécheurs. »

Et encore… 

Le 13 juillet 1991, Bernardo reçoit ce message : « Bernardo, le Seigneur est très triste, car le Nicaragua commet beaucoup de péchés collectifs. »

Position de l’évêque 

Mgr Pablo Antonio Vega Mantilla, évêque de Juigalpa, sensible à la transparence de Bernardo et aux messages sur les devoirs sociaux des fidèles, a accepté la publication du récit des apparitions, avec son approbation, sans prendre position sur les apparitions.

Après avoir fait toutes ses classes au petit puis au grand séminaire, Bernardo a été ordonné prêtre le 20 août 1995.


Extraits de : Patrick SBALCHIERO, « Cuapa, Nicaragua », dans : René LAURENTIN et Patrick SBALCHIERO, Dictionnaire encyclopédique des apparitions de la Vierge. Inventaire des origines à nos jours. Méthodologie, prosopopée, approche interdisciplinaire, Fayard, Paris 2007, annexes.

 

 


 

F. Breynaert