Concile de Chalcédoine : la précision du langage

La Theotokos au concile de Chalcédoine

En paroles brèves

Le concile de Chalcédoine en 451 donne à la doctrine mariale du concile d’Ephèse sa forme dogmatique :

Le Fils « qui avant les siècles est engendré par le Père selon la divinité, dans les derniers jours, le même, pour nous et pour notre salut, est engendré par Marie Vierge Mère de Dieu selon l’humanité ».

Le concile de Chalcédoine professe « un seul et même Christ, Fils unique et Seigneur, en deux natures, sans confusion ou mutation, sans division ou séparation entre ces deux natures ».

H.DENZINGER - A.SCHÖNMETZGER,

Enchiridion Symbolorum,

Definitionum et declarationum de rebus fidei et morum,

Herder, § 301-302.

Importance spirituelle pour la vie de tous les jours :

Ce concile veut assurer aux chrétiens :

- de pouvoir pleinement imiter Jésus (Jésus n’est pas un étrange mutant, il est imitable, cf. par exemple Jn 13,15).

- et de pouvoir l’adorer (Jésus est vraiment Dieu, sans séparation, les hommes l’adorent, cf. par exemple Mt 2,11). Le Christ est uni à la divinité dans séparation : en lui Dieu nous a visités, nous sommes vraiment sauvés, vivifiés, le chemin de la vie éternelle nous est ouvert.

Ou encore :

- La nature humaine n'est pas confondue avec la nature divine, il y a place pour les vertus humaines, les efforts, la prudence etc.

- La nature divine est unie à la nature humaine, c'est toute la vie de la grâce dans l'Esprit Saint qui nous est ouverte.

La maternité divine de Marie est la clé de voûte qui permet de ne pas faire d'erreur et de tenir tous les aspects du mystère.

Histoire du concile de Chalcédoine (1)

L'erreur du monophysisme, et le moine Eutiche

Après le concile d’Ephèse le problème du nestorianisme ne s’est pas éteint, et l’ambiguïté terminologique avec lequel sa doctrine était énoncée, et interprétée de façon erronée par certains milieux comme certains moines non préparés théologiquement, provoqua une nouvelle erreur christologique et mariologique, le monophysisme, qui affirmait l’existence en Christ d’une seule nature (mono physis) après l’union des deux natures.

Le héraut du monophysisme fut un moine de Constantinople, Eutiche.

Une image avec laquelle les monophysites illustrent leur doctrine était la suivante: la divinité et l’humanité forment en Christ une seule nature, en tant que la nature divine a accueilli en soi la nature humaine comme la mer accueille en soi une goutte d’eau.

Certaines interprétations monophysites concernaient aussi la doctrine de la maternité divine, car ils affirmaient que la chair du Christ était une chair céleste et que son humanité était divinisée dans l’union ; un fait qui expliquerait la virginité de la mère non seulement dans la conception mais aussi dans l’accouchement, et la Theotokos n’est pas mère au vrai sens du terme.

Le concile

L’empereur, préoccupé pour l’unité des églises, convoqua un nouveau concile oecuménique à Chalcédoine en 451.

350 pères y participèrent dont 6 représentants de l’église d’Occident y compris les légats du pape. C’est certainement la plus importante assemblée de l’église ancienne avec valeur effectivement oecuménique.

Les principaux documents de Chalcédoine sont :

  • Le Décret formulé par le concile.

Conjointement, doivent être considérés comme documents lus et interprétés :

  • Les symboles de Nicée et Constantinople,
  • Les Lettres aux orientaux,
  • La 2e Lettre de Cyrille à Nestorius,
  • La Lettre dogmatique à Flavien du pape Léon contre le monophysisme proclamé "colonne des dogmes les plus sûrs de la foi". Ce dernier document, qui précéda de peu le concile, influença fortement l’élaboration de la profession de foi du concile de Chalcédoine.

Aspects théologiques (1)

Le Christ

Le concile de Chalcédoine en 451 professe un seul et même Christ, Fils unique et Seigneur, en deux natures, sans confusion ou mutation, sans division ou séparation entre ces deux natures.

L’union des deux natures ne fait pas disparaître leur différence spécifique et les deux natures concourent dans l’unique personne et subsistance du Christ en conservant chacune sa caractéristique propre.

L'union des deux natures est :

« sans confusion,

sans mutation,

sans division,

sans séparation »

En niant la possibilité de confusion ou de mutation des deux natures dans l’Incarnation elle s’oppose à l’interprétation monophysite.

En niant la possibilité de division ou séparation des deux natures, elle s’oppose à l’interprétation du nestorianisme.

La terminologie prend un sens théologique précis qui deviendra classique ensuite.

"physis" désigne la nature,

"hypostasis" désigne la subsistance du sujet,

"prosopon" désigne la personne.

Marie

Voici la formule du concile : le Fils

« qui avant les siècles est engendré par le Père selon la divinité, dans les derniers jours, le même, pour nous et pour notre salut, est engendré par Marie Vierge Mère de Dieu selon l’humanité » (DS 301).

En disant que le Fils est engendré de Marie "virgine Deipara" (Vierge Mère de Dieu), le concile de Chalcédoine compose les termes de celui de Constantinople (Marie, La Vierge), avec ceux du concile d’Ephèse (Mère de Dieu et Vierge), même s’il omet la référence à l’Esprit Saint du concile de Constantinople.

Une nouvelle richesse de sens :

Le titre "Vierge" exprime désormais une condition de la mère au vrai sens - la chair du Christ n'est pas absorbée par la divinité comme une goutte dans l'océan.

La "maternité divine" devient la clé de voûte pour l’interprétation d’une vraie unité dans la personne du Christ, subsistant en deux natures distinctes mais sans division.

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(1) Cf. S.Meo, Madre di Dio, nel Nuovo dizionario di mariologia, a cura di de Fiores, ed. san Paolo 1985, p.737-739

S. Meo