L'Assomption : du sanctuaire de Gethsémani à celui de Blacherne


La deuxième homélie saint Jean Damascène († 750) sur la Dormition de Marie est un témoignage sur l'histoire de la tradition : l'évêque de Damas fait en effet référence au sanctuaire byzantin de Blacherne (basilique sainte Marie Mère de Dieu, dite Sainte-Marie des Blachernes », qui constituait le sanctuaire le plus sacré de Constantinople, et contenait la robe de la Vierge Marie, puis, ensuite, une partie de sa ceinture et de son maphorion, ainsi qu’une icône appelée la Bachernitissa (offerte par l’empereur Léon Ier). St Jean Damascène explique en effet comment ce sanctuaire s’inscrit dans la tradition liturgique du sanctuaire judéo-chrétien de Gethsémani.

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L'Assomption : du sanctuaire de Gethsémani à celui de Blacherne

St Jean Damascène résume ainsi la tradition judéo-chrétienne, transmise par Juvénal :

De Gethsémani à Blacherne

"[...] Vous voyez, chers pères et frères, tout ce que nous révèle ce tombeau plein de gloire. Et comme preuve qu’il en est bien ainsi, voici ce qui est écrit en propres termes dans l’Histoire euthymiaque, au troisième discours, chapitre 40 :

'On dit plus haut comment Pulchérie éleva dans Constantinople de nombreuses églises au Christ. L’une d’elles est celle qui fut édifiée aux Blachernes au début du règne de Marcien, de divine mémoire. Ces souverains donc, ayant bâti en cet endroit un sanctuaire dédié à la glorieuse et toute Theotokos, Marie toujours Vierge, et l’ayant orné de tout le décor possible, étaient à la recherche de son corps très saint, qui avait reçu Dieu.

Ils firent appeler l’archevêque de Jérusalem, Juvénal, et les évêques de Palestine, qui se trouvaient alors dans la capitale à cause du concile qui s’était tenu à Chalcédoine, et ils leur dirent :

"Nous apprenons qu’il y a, à Jérusalem, la première église de la toute Théotokos et toujours Vierge Marie, magnifique entre toutes, à l’endroit appelé Gethsémani, où le corps de cette Vierge, qui fut le séjour de la vie, fut déposé dans un cercueil. Or nous voulons faire venir ici cette relique pour la sauvegarde de cette capitale."

Le rappel de la tradition judéo-chrétienne apocryphe

Prenant la parole, Juvénal répondit :

"Dans la Sainte Écriture inspirée de Dieu on ne raconte pas ce qui se passa à la mort de la Theotokos Marie, mais nous tenons d’une tradition ancienne et très véridique qu’au moment de sa glorieuse dormition, tous les saints Apôtres, qui parcouraient la terre pour le salut des nations, furent assemblés en un instant par la voie des airs à Jérusalem.

Quand ils furent près d’elle, des anges leur apparurent dans une vision, et un divin concert des puissances supérieures se fit entendre. Et ainsi, dans une gloire divine et céleste, la Vierge remit aux mains de Dieu sa âme d’une manière ineffable. Quant à son corps, réceptacle de la divinité, il fut transporté et enseveli, au milieu des chants des anges et des Apôtres, et déposé dans un cercueil à Gethsémani, où pendant trois jours persévéra sans relâche le chant des chœurs angéliques.

Après le troisième jour, ces chants ayant cessé, les Apôtres présents ouvrirent le cercueil à la demande de Thomas qui seul avait été loin d’eux, et qui, venu le troisième jour, voulu vénérer le corps qui avait porté Dieu. Mais son corps digne de toute louange, ils ne purent aucunement le trouver ; ils ne trouvèrent que ses vêtements funèbres déposés là, d’où s’échappait un parfum ineffable qui les pénétrait, et ils refermèrent le cercueil.

Saisis d’étonnement devant le prodige mystérieux, voici seulement ce qu’ils pouvaient conclure : celui qui dans sa propre personne daigna s’incarner d’elle et se faire homme, Dieu le Verbe, le Seigneur de la gloire, et qui garda intacte la virginité de sa Mère après son enfantement, celui-là avait voulu encore, après son départ d’ici-bas, honorer son corps virginal et immaculé du privilège de l’incorruptibilité, et d’une translation avant la résurrection commune et universelle. Étaient présents alors avec les Apôtres, le saint apôtre Timothée, premier évêque d’Ephèse, et Denys l’Aréopagite [...]."

L'origine des reliques vénérées à Blacherne

"À cette réponse, les souverains demandèrent à l’archevêque Juvénal lui-même de leur envoyer, dûment scellé, ce saint cercueil avec les vêtements funèbres de la glorieuse et toute Theotokos Marie, qui s’y trouvaient. L’ayant reçu, ils le déposèrent dans le sanctuaire élevé aux Blachernes en l’honneur de la Theotokos."

Source :

Saint Jean Damascène, Extraits de la "Deuxième homélie sur la Dormition de Marie".

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Pour en savoir plus

- sur saint Jean Damascène, dans l’Encyclopédie mariale

- sur l’Assomption dans la tradition de l’Église, dans l’Encyclopédie mariale

-sur Blacherne et le manteau de Marie, dans l’Encyclopédie mariale

-sur les reliques vestimentaires de la Vierge Marie, dans l’Encyclopédie mariale

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