Le prophète Isaïe (1er Isaïe, Is 1-39)

Le premier Isa?e

Le contexte historique

En l'an 733, les rois Raçon de Damas et Peqah de Samarie (Israël), dans leur insurrection contre l'Assyrie avaient aussi voulu inclure le roi Achaz du royaume de Juda (Jérusalem).

Mais Achaz, sentant bien que cette insurrection n'avait aucune chance de réussir, avait fait un pacte avec l'Assyrie pour être protégé, et dans ce pacte, il avait accepté l'adoration des divinités de l'Assyrie.

Alors Isaïe, pour inviter le roi Achaz à s'en remettre au Dieu vivant plus qu'à sa "realpolitik", lui donne « un signe », la naissance d'un enfant (Is 7, 14) : « Car avant que l'enfant sache rejeter le mal et choisir le bien, elle sera abandonnée, la terre dont les deux rois te jettent dans l'épouvante. » (Isaïe 7, 16).

En effet, après la guerre fratricide (-735) entre le Nord (Samarie) et le Sud (Jérusalem), pendant le règne d'Ezéchias, advient la chute de Samarie (-721) aux mains de l'Assyrie (Isaïe 28).

Cependant, il n'est pas convainquant de penser que la naissance d'Ezéchias puisse constituer « un signe » pour le roi Achaz ; ainsi, le signe donné (Is 7, 14) doit on penser que le signe dépasse le contexte historique et s'adresse au monde entier.

Ezéchias renforce les remparts, stimule la conversion, mais finalement il fait une alliance avec l'Egypte ! Mais pour Isaïe, les rois peuvent se comporter comme des gamins, Dieu reste fidèle. Il ne permettra pas la destruction de Sion. Et, en effet, quand une fois de plus les Assyriens (avec Sennacherib) envahissent le pays, ils arrivent sous les remparts, et font demi-tour !

Une étape spirituelle qui est un tournant

Le premier Isa?e est un homme de haut rang social. Sa parole est difficile à cacher. Ses lèvres, purifiées par le feu, prononcent une parole difficile. Son récit de vocation témoigne de l'étape spirituelle nouvelle que Dieu lui fait franchir :

« Va, et tu diras à ce peuple : Ecoutez, écoutez, et ne comprenez pas ; regardez, regardez, et ne discernez pas… »

(Is 6,9)

Ce texte signifie que le peuple ne doit pas revenir à l’ancienne manière de comprendre, au temps des juges ou du roi David, quand les victoires et la réussite de l'histoire était le signe que Dieu était avec nous. Désormais mieux vaut ne pas adorer plutôt que d'adorer un "Dieu" tellement semblable à notre désir qu'il n'est plus qu'une idole.

Dans le temple, Isa?e a une vision : Dieu est Roi

Dieu est saint (Is 6,1-13), c’est-à-dire séparé, autre que ce que l’on croit savoir.
Il est sur un « trône » comme un Roi céleste (c'est la première fois dans la Bible).
Sa gloire ("Kabod") « remplit toute la terre » : YHWH a un tel poids de présence, qu'il fait le poids de tous les autres rois.
Maître du monde (6,3), il règne même sur les puissances étrangères (Is 10,5-15).
Dieu a un plan pour toutes les nations (14,26-27) et attirera toutes les nations à Jérusalem (2,2-5).

Cette vision a plusieurs conséquences pour le peuple :

Face aux événements et à la sainteté de Dieu il faut reconnaître le péché :

- péché à propos du culte et sur le plan social ;

- orgueil (2,11-22 ; 29,13-16) ;

- aveuglement politique (7,1-9 ; 22,9-12).

Le peuple doit rester ferme dans sa foi : Dieu règne.

Isa?e se situe dans le registre de l’amour : Dieu est l’époux qui aime et soigne Juda comme sa vigne.

Isa?e chante l’ami qui prend la défense de l’époux contre sa femme infidèle.

Le salut passe par le roi, descendant de David. Dieu est fidèle à la promesse faite à David par Nathan (Is 38,5, cf. 2S 7).

Déçu par le roi Achaz, Isaïe espère en son fils Ezéquias dont il est probablement le précepteur, et en qui il voit un roi selon le cœur de Dieu (2R 18,1-7).

Isaïe croit au roi qui correspond au Roi céleste, YHWH. L’avènement de ce roi - auquel il faut laisser son mystère - est annoncé comme un signe du Seigneur (Is 7,10-25). Son règne sera un règne de paix et de prospérité (Is 9,1-6 et 11,1-9).


Sources :

Cahier de l’Evangile n°23, Isa?e 1-39 ;

J. Ratzinger, Benoît XVI, L'enfance de Jésus, Flammarion, Paris 2012, p. 71-76


Synthèse F. Breynaert