La résurrection annoncée par le prophète Daniel (Dn 11-12)

Isaïe à 52-53 inspire Daniel

De même qu’il y a des prophètes individuels, il y a des pionniers dans les voies spirituelles. Le texte originel d’Isaïe vise (du moins certainement en grande partie), un individu. Daniel reprend une théologie spirituelle très voisine, mais qui concerne un groupe. Le Serviteur, le juste, est d’abord un individu, un seul, ensuite, un peuple entier marche sur ses traces et vit ce qu’il a vécu.

Daniel continue la réflexion sur la mort des martyrs commencée par Isaïe

Les traductions ne sont jamais faciles...

Dans la Bible de Jérusalem l’hébreu "ba-hem" est traduit "parmi eux" :

« Parmi les doctes, certains trébucheront, en sorte que dans le nombre il y en ait qui soient purifiés, lavés et blanchis -- jusqu'au temps de la Fin, car le temps fixé est encore à venir. »

(Dn 11, 35)

Pierre Grelot propose pour l’hébreu "ba-hem" un sens instrumental :

« Et parmi les doctes, il en est qui trébucheront pour que se fasse, grâce à eux, un affinage, une purification et un blanchissement jusqu’au temps de la fin. »

(Dn 11,35)

Et il se justifie ainsi :

Il n’y a aucun contact verbal entre ce passage et le quatrième poème du serviteur (Is 52,13-Is 53,12), mais on peut se demander si l’interprétation sacrificielle d’Isaïe n’est pas à l’arrière plan de la réflexion sur la mort des martyrs. Daniel identifie le serviteur au groupe des pieux fidèles, les Hasidîm, qui non seulement instruisent le peuple mais se sacrifient pour le purifier. [1]

La résurrection devient explicite

Dans le livre d’Isaïe (« A la suite de l'épreuve endurée par son âme, il verra la lumière... » Is 53,11) le langage technique qui caractérise le thème de la résurrection est encore absent.

Cette idée de résurrection est exprimée de façon claire plus tard (2 Mac 7 ; Daniel 12 ; Targum). Voici Daniel :

« 2 "Un grand nombre de ceux qui dorment au pays de la poussière s'éveilleront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour l'opprobre, pour l'horreur éternelle.
3 Les doctes resplendiront comme la splendeur du firmament, et ceux qui ont enseigné la justice à un grand nombre, comme les étoiles, pour toute l'éternité. »

(Dn 12,2-3)

Mais Daniel 12, 3 a un point de contact avec Isaïe 52, 13 : Le Serviteur et les doctes du livre de Daniel triomphent (c’est le même verbe hébreu yaskîl, un verbe qui signifie triompher et faire preuve d’intelligence). Il y a une progression de la révélation de l'un à l'autre.

Jésus accomplit la prophétie de Daniel

La résurrection de Jésus accomplit la prophétie de Daniel : sa vision d’un sacrifice purificateur (Dn 11, 35) et sa vision de la résurrection des justes (Dn 12, 2-3). Cependant, ces versets ne sont pas cités par le Nouveau Testament.

Le livre de l'Apocalypse s'inspire de Daniel :

La «femme» trouve de la nourriture dans le désert « pour un temps, deux temps et la moitié d’un temps » (Ap 12,14). « Un temps, deux temps et la moitié d’un temps » vient du livre de Daniel (Dn 7,25) qui l’utilisait en rapport à la persécution d’Antiochus IV Epiphane (168-165 av J-C). C'est trois et demi, c'est la moitié de sept : un temps limité.

Cette durée est équivalente aux 1260 jours où femme est nourrie au désert (Ap 12,6).

Et 1260 jours correspondent aussi aux 42 mois (42 x 30 jours = 1260 jours) pendant lesquels les deux témoins prophétisent et invitent à la pénitence, avant de mourir martyr et de ressusciter, conduisant les nations à rendre gloire à Dieu (Ap 11,2-3).

Tous ces chiffres disent que la persécution et le mal n'auront pas le dernier mot.


Cf. Pierre GRELOT, Les poèmes du serviteur, de la lecture critique à l’herméneutique, Ed. du Cerf, 29 bd Latour-Maubourg, Paris, 1981., p. 120-121


Françoise Breynaert