L'historicité de l'étoile

L'étoile et le voyage des Mages

« Jésus étant né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode, voici que des mages venus d'Orient arrivèrent à Jérusalem en disant: "Où est le roi des Juifs qui vient de naître? Nous avons vu, en effet, son astre à son lever et sommes venus lui rendre hommage". [...] Sur ces paroles du roi, ils se mirent en route; et voici que l'astre, qu'ils avaient vu à son lever, les précédait jusqu'à ce qu'il vînt s'arrêter au-dessus de l'endroit où était l'enfant. A la vue de l'astre ils se réjouirent d'une très grande joie. Entrant alors dans le logis, ils virent l'enfant avec Marie sa mère, et, se prosternant, ils lui rendirent hommage. »

(Matthieu 2, 1-11)

  • L'étoile ne marque plus le déterminisme cosmique mais désigne le Christ

Avant le Christ on pensait que chacun naît « sous une étoile » qui marque sa destinée.

Dans l'évangile, l'étoile se soumet au Christ et sert d'indicateur pour montrer l'endroit de sa naissance.

La première leçon est que le Christ nous libère du déterminisme cosmique. Nous ne sommes pas des fils de la terre, nous sommes fils de Dieu.

  • La démarche des mages cadre bien avec l'attente messianique de l'époque.

Jadis, le mage Balaam, en Mésopotamie, avait annoncé : « Il se lèvera en Jacob une étoile et il surgira d'Israël un sceptre » (Nombre 24, 17).

Les mages, tant chaldéens que perses, n'avaient pu ignorer les prédictions du prophète sur le Messie et ils avaient calculé la date de son avènement (Daniel 9).

D'autres traditions messianiques de ce temps encourageaient aussi leur démarche religieuse. Dans le livre persan Oracles magiques, œuvre du pseudo-Zoroastre, on lisait aussi qu'une vierge enfanterait un saint, dont l'apparition serait annoncée par une étoile.

  • Le récit de l'Evangile n'a rien d'opposé à la science historique, au contraire.

Le Talmud de Babylone rappelle que dans les derniers temps d'Hérode 1er, un grand nombre de gentils se rendirent à Jérusalem pour voir se lever l'étoile de Jacob, à laquelle on s'attendait (Traité Sanhédrin 11, 1). Il y a là, à la fois, une date et une confirmation indirecte de l'Evangile.

L'arrivée d'étrangers montés sur leurs chameaux, avec des serviteurs chargés de bagages, était un fait banal : Israël était le chemin que suivaient nécessairement les caravanes pour aller de Babylone à Memphis. Leur attitude a pu cependant étonner les habitants de Bethléem.

  • La marche à l'étoile décrite par saint Matthieu est réaliste et plausible.

Saint Matthieu dit que les Mages étaient venus des contrées de l'Orient et avaient vu l'étoile « à l'Orient ». « A l'Orient » désigne le point du ciel où était l'étoile quand ils l'aperçurent.

Si les Mages avaient voulu indiquer les pays où ils avaient vu l'étoile, ils auraient dit « Nous l'avons vu en Arabie, ou en Perse ».

Pour que cette étoile puisse être un signe, il s'agit d'une étoile temporaire, comme l'astronomie en connaît, à apparition subite et à éclipses consécutives.

Les Mages ont vu l'étoile et ils se sont mis en route. Ils n'avaient pas besoin de l'étoile pour aller de leur pays, soit la Chaldée, soit l'Arabie, soit la Perse, à Jérusalem, par la route fréquentée des caravanes. Arrivés à Jérusalem, ils n'avaient pas non plus besoin d'être guidés pour aller à Bethléem à huit kilomètres de là. Mais il leur fallait un phare céleste pour leur indiquer la maison du roi nouveau-né, cette étoile apparue assez bas sur l'horizon pour servir de point de repère à une maison isolée adossée à la colline[1].

Une peinture du II° siècle au cimetière de Domitille, à Rome, offre la scène de l'adoration des mages, avec l'étoile, qu'on trouve ensuite souvent représentée dans les catacombes.



[1] Pour comprendre ce que saint Matthieu dit de l'étoile, guide des Mages, on peut rapprocher son récit de ce que Varron rapporte, au sujet d'Enée, d'après une tradition qu'il a recueillie, en l'an 44 avant notre ère, sur les côtes de l'Asie et qu'il a consignée dans le livre de ses Antiquités Juives. « Depuis son départ de Troie, Enée vit quotidiennement pendant le jour l'étoile de Vénus, jusqu'à ce qu'il arrive au champ des Laurentins, où il cessa de la voir, ce qui lui fit connaître que c'était les terres désignées par le destin. » (Varron, ap. serv. Aeneïd., I, 386).


Résumé par F. Breynaert de Arthur LOTH, Jésus-Christ dans l'histoire,

F-X de Guibert, 2003, p. 357-365