Julius Schnorr von Carolsfeld, Les noces de Cana, 1819

Julius Schnorr von Carolsfeld, Les noces de Cana, 1819

Julius Schnorr von Carolsfeld (Leipzig, 26 mars 1794 - Munich, 24 mai 1872) est un peintre et graveur allemand, représentatif du mouvement nazaréen, alliant avec bonheur la précision graphique de la culture germanique avec une animation toute latine. Il est l'auteur de nombreuses œuvres d'inspiration biblique.

Son tableau, "Les noces de Cana", 1819-1820, décrit avec animation le mariage béni par le Christ, Seigneur et Créateur.

Il met en valeur les six jarres, allusion à toute la préparation juive.

Il évoque l'heure de la croix où Jésus, entouré de Marie et Jean, révèle le sommet de l'amour.

Il s'agit, selon l'évangile de Jean, du premier signe de Jésus. Et c'est un miracle qui bénit un mariage.

Tout ce qui a été dit comme commentaire de Jn 2, 1-12 , la bénédiction du mariage, convient en commentaire de ce tableau.

Le miracle de Jésus qui transforme l'eau en vin ne se fait pas avec n'importe quelle eau, mais avec l'eau des six jarres. La loi de Moïse est symbolisée par les jarres de pierre, car l'eau représente la Torah, et la pierre représente la pierre où ont été écrits les dix commandements. Et on peut entendre la loi de Moïse au sens large, avec les prophètes et les écrits de sagesse, et les « six âges » de l'Ancien Testament. C'est à partir de ces six jarres d'eau que Jésus accomplit le signe, autrement dit, Jésus va bénir le mariage à partir de toute la préparation spirituelle de l'Ancien Testament. Rappelons-en quelques jalons :

Le décalogue purifie le mariage :

« Tu ne commettras pas d'adultère [...] Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain. »

(Exode 20, 14 et 17)

Le Deutéronome permet la répudiation avec un acte écrit pour protéger les femmes (Dt 24, 1-4).

Le prophète Malachie rappelle le dessein du Créateur :

« N'a-t-il pas fait un seul être, qui a chair et souffle de vie ? Et cet être unique, que cherche-t-il ? Une postérité donnée par Dieu! Respect donc à votre vie, et la femme de ta jeunesse, ne la trahis point ! Car je hais la répudiation, dit YHWH le Dieu d'Israël. »

(Ml 2, 15-16)

Voici aussi la très belle prière de Tobie avec Sarah la nuit de leur mariage :

« Tu es béni, Dieu de nos pères, et ton Nom est béni dans tous les siècles des siècles! Que te bénissent les cieux, et toutes tes créatures dans tous les siècles! C'est toi qui as créé Adam, c'est toi qui as créé Eve sa femme, pour être son secours et son appui, et la race humaine est née de ces deux-là. C'est toi qui as dit: Il ne faut pas que l'homme reste seul, faisons-lui une aide semblable à lui. Et maintenant, ce n'est pas le plaisir que je cherche en prenant ma sœur, mais je le fais d'un cœur sincère. Daigne avoir pitié d'elle et de moi et nous mener ensemble à la vieillesse ! »

(Tobie 8, 5-7)

Jésus change cette eau en vin, comme si son heure était venue. Dans l'évangile de Jean, l'heure, c'est celle de la Croix.

Comme sur la croix, Jésus est entouré de Marie, sa mère, et de Jean.

Comme sur la croix, Jésus élève aux noces de Cana l'amour humain au rang de l'amour divin.

Dans l'iconographie chrétienne, son geste de la main droite est celui de Dieu créant le monde, manifestant qu'en lui, de la Genèse à la fin des temps, en passant par la Croix, c'est le même ‘grand mystère' des noces de Dieu avec l'humanité qui s'accomplit.


Françoise Breynaert