La Vierge de Vladimir


Parmi les icônes les plus vénérées en Russie, représentant la Vierge Marie Théotokos, Mère de Dieu, sous la forme d’une Vierge à l’Enfant, celle de Notre-Dame de Vladimir, ou Vladimirskaïa est l’une des plus fameuses. Son histoire la place en effet au rang des icônes miraculeuses. Elle est fêtée le 3 juin par les Orthodoxes.

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L’histoire de l’icône de la Mère de Dieu

L’icône de la Mère de Dieu de Vladimir, appelée Vladimirskaïa, est l’une des plus célèbres des icônes représentant la Mère de Dieu. Cette icône est une copie de l’icône originale de la Vierge, œuvre de l’évangéliste saint Luc.

Plusieurs copies de l’icône originale furent réalisées, et l’icône de la Mère de Dieu fut transportée par mer au XIIès de Constantinople à Kiev, offerte par le patriarche de Constantinople au Grand-Duc Iouri Dolgorouki, le futur fondateur de Moscou, qui transféra le siège du pouvoir des Grands Princes de Russie de Kiev à Vladimir. André Bogolioubski, le fils de Iouri, emporta l’icône à Vladimir. On raconte que les chevaux qui transportaient l’icône s’arrêtèrent près de Vladimir, refusant d’aller plus loin. On construisit donc la cathédrale de la Dormition pour abriter l’icône miraculeuse. Celle-ci fut transportée plus tard à Moscou, où l’icône fut vénérée lors des cérémonies officielles, dans tous les événements importants de la vie politique du pays, et protégea la ville, notamment à trois reprises, lorsque Moscou fut menacée par une invasion de l'Est, et qu’elle fut sauvée par une intervention miraculeuse grâce à cette icône.

Une « Théotokos » de tendresse

Il existe plusieurs types d’icônes représentant la Théotokos (Mère de Dieu) : on la représente en majesté (« Kyriotissa »), montrant le chemin (« Hodiguitria »), ou dans une relation de douce affection avec l’Enfant (Vierge de Tendresse ou « Éléousa »), etc. [1] La Vladimirskaïa ou icône de Vladimir est l’une des plus anciennes icônes de la Mère de Dieu (Théotokos), de type Éléousa (Vierge de « Tendresse »). Elle porte l'Enfant-Jésus, qui se blottit contre la joue maternelle. Le visage grave de la Mère s’incline sur celui de l'Enfant, qui lève vers Elle son visage.

Le visage de la Vierge de Vladimir

Le visage de la Vierge est empreint de chaleur et de compréhension humaine. Entièrement tissée par les traits transcendants et déifiés de la nouvelle créature, son visage plein de majesté céleste porte tout l'humain, présent lui-aussi en même temps. C'est son miracle.

Le regard de la Vierge de Vladimir

Le regard de la Vierge est remarquable par sa profondeur. Il n'est pas tourné, attendri vers l'enfant comme on pourrait s'y attendre. Il accueille au contraire toute attente humaine qui le rejoint et s'y confie. Qui a vu cette icône, surtout l'original, ne peut jamais oublier son regard; comme "sa mère gardait toutes ces choses dans son cœur" (Lc 2,51), il garde ainsi cette vision dans son cœur pour toujours, comme la "perle" dont parle l'Évangile.

Le vêtement de la Vierge de Vladimir

La Mère porte sur la tunique le « maphorion » qui lui entoure la tête (le voile, le « pokrov ») bordé d'un galon précieux et orné de trois étoiles, une sur le front, les autres deux sur les épaules, symbole de sa virginité perpétuelle, avant, pendant et après l’enfantement de Jésus. Les étoiles sur les épaules sont également un signe de puissance : en Orient, un serviteur embrassait son maître sur l'épaule.

L'enfant Jésus

La représentation de l'enfant est loin de l'ingénuité touchante de l'enfant Jésus. C'est aussi le Verbe, toujours vêtu des vêtements des adultes, tunique et manteau, « l'hymation » : c’est seulement sa taille qui indique qu'il s'agit d'un enfant : Son visage sérieux et majestueux réfléchit la Sagesse divine. Son vêtement est tout tissé de fil d'or, lumière du soleil sans couchant, couleur de la dignité divine.

La composition, le sens ultime

Le centre de la composition se trouve à la hauteur du cœur de la Vierge et aussi au niveau du cou puissant de l'enfant, appelé "souffle", car il est le symbole du souffle de l'Esprit Saint qui repose sur le Verbe.

La composition a la forme d'un triangle inscrit dans un rectangle allongé, mystère de la Trinité inscrit dans l'être du monde. L'enfant s'inscrit dans un cercle qui évoque l'hostie. Par la géométrie, on peut dire aussi que la Vierge est pleinement humaine et harmonieuse et que l'Enfant divin rayonne dans le monde.

La Vierge porte l'enfant sur le bras droit, la main gauche l'effleure à peine et semble plutôt montrer l'enfant au regard de tous. L'enfant serre affectueusement son visage contre celui de sa mère, il est tout entier dans cet élan de tendresse et de consolation. Il porte son attention sur l'état d'âme de sa Mère, ce qui est très visible dans le mouvement de ses yeux. Cette attitude se réfère déjà à une autre composition iconographique, celle de la sépulture : "Ne me pleure pas, ô Mère...".

L'Enfant a pour sa mère le geste d'une caresse rassurante ; une main serre son maphorion, l'autre est posé tendrement sur son cou. La mère est prise par l'ombre des souffrances futures. Sa tête, légèrement inclinée vers l'enfant, adoucit sa majesté de Mère de Dieu.

Elle est également l’image de l'Église qui porte aussi en elle le salut : tout en l'attendant encore, elle confesse et attend la Résurrection à travers la Croix.

Sources :

Pavel EVDOKIMOV, in Tomáš SPIDLIK, Giovanni GUAITA, Maria CAMPATELLI, Testi mariani del secondo Millennio, II, Città nuova, 2000, p. 482-483

Maria Donadeo, Icônes mariales russes, 1990, p. 11.

Egon Sendler S.J., Les icônes byzantines de la Mère de Dieu, 1992, pp. 83-164

Ephrem Yon, Glossaire Ph. Sers (dir), Les saintes icônes, une nouvelle interprétation, Paris : Ph. Sers, 1990, p. 103-104


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Pour en savoir plus

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