Clovis et la loi salique : Dieu pour fondateur

Clovis et la loi salique : Dieu pour fondateur

La Loi salique est le recueil des anciennes coutumes des tribus franques. Clovis l'a reprise de ses ancêtres mais, après son baptême, il l'a amendée. Seuls, le prologue et le décret nous intéressent ; ils contiennent l'essentiel, qui donne aux lois proprement dites tout leur sens. Ils forment la première « constitution » de la nation des francs. Dans l'une des copies de la loi salique, rédigée une cinquantaine d'années après le baptême de Clovis à Reims, on peut lire :

"La nation des Francs, illustre, ayant Dieu pour fondateur, forte sous les armes, ferme dans les traités de paix, profonde en conseils, noble et saine de corps, d'une blancheur et d'une beauté singulières, hardie, agile et rude au combat, depuis peu convertie à la foi catholique, libre d'hérésie ; lorsqu'elle était encore sous une croyance barbare, avec l'inspiration de Dieu, recherchant la clef de la science, selon la nature de ses qualités, désirant la justice, gardant la piété, la loi salique fut dictée par les chefs de cette nation qui, en ce temps, commandaient chez elle.

"On choisit, entre plusieurs, quatre hommes, à savoir : le Gart de Wise, le Gart de Bade, le Gart de Sale, le Gart de Winde, dans les lieux appelés Canton de Wise, Canton de Bade, Canton de Sale et Canton de Winde.

"Ces hommes se réunirent dans trois Mahls, discutèrent avec soin toutes les causes du procès, traitèrent de chacune en particulier et décrétèrent leur jugement en la manière qui suit :

"Puis, lorsqu'avec l'aide de Dieu, Clovis, le chevelu, le beau, l'illustre Roi des Francs, eut reçu le premier le baptême catholique, tout ce qui, dans ce pacte, était jugé peu convenable fut amendé avec clarté par les illustres Rois Clovis, Childebert et Clotaire, et ainsi fut dressé le «décret» suivant :

"Vive le Christ qui aime les Francs ; qu'il garde leurs Royaumes et remplisse leurs chefs de la lumière de la grâce ; qu'il protège leurs armées ; qu'il leur accorde des signes qui attestent leur foi : les joies de la paix et la félicité. Que le Seigneur Jésus-Christ dirige dans les voies de la piété les règnes de ceux qui gouvernent, car cette nation est celle qui, brave et forte, secoua de sa tête le joug des Romains et qui, après avoir reconnu la sainteté du baptême, orna somptueusement d'or et de pierres précieuses les corps de saints martyrs, que les Romains avaient brûlés sur le feu, mutilés par le fer ou fait déchirer par les bêtes féroces".

Extrait de : Claire Martigues, Le Pacte de Reims, Ed. Saint-Michel,1962.

Prière

"Vive le Christ qui aime les Francs ; qu'il garde leurs Royaumes et remplisse leurs chefs de la lumière de la grâce ; qu'il protège leurs armées ; qu'il leur accorde des signes qui attestent leur foi : les joies de la paix et la félicité. Que le Seigneur Jésus-Christ dirige dans les voies de la piété les règnes de ceux qui gouvernent, car cette nation est celle qui, brave et forte, secoua de sa tête le joug des Romains et qui, après avoir reconnu la sainteté du baptême, orna somptueusement d'or et de pierres précieuses les corps de saints martyrs, que les Romains avaient brûlés sur le feu, mutilés par le fer ou fait déchirer par les bêtes féroces".

(Extrait du prologue mérovingien de la loi salique)

Clovis, une évolution qui ne fait que commencer

La tribu de Clovis, les Francs saliens, est alliée de Rome depuis le III° siècle et les chefs francs ont souvent le titre de général de l'armée romaine. Ce qu'on appelle la Gaule (ou les Gaules) est constituée, comme une mosaïque, de peuples très divers dont les francs sont un petit élément. Les Francs saliens tiennent surtout l'actuelle Belgique.

L'Église existe en Gaule depuis le II° siècle avec la Communauté lyonnaise (martyre de Pothin et de Blandine en 177). Mais elle se heurte à la puissante hérésie arienne. Clovis, lui et son peuple, sont païens. Leur religion est une religion de puissance et de fécondité. Lorsque sous diverses influences (sa femme Clotilde, l'évêque Remi, l'ermite saint Waast), Clovis s'orientera vers la foi catholique, ce ne sera pas sans de grandes hésitations et sans être conscient de ce que signifie de devenir catholique.

Lorsque Clovis est baptisé, tout son peuple ne se précipite pas à son tour dans le baptistère : seule sa garde personnelle reçut le baptême. Le baptême de Clovis n'est pas le baptême des Francs.

A l'évocation de ces quelques éléments, on peut se rendre compte que si, le baptême de Clovis a été déterminant pour l'avenir des relations entre ce qui sera plus tard la France et l'Eglise catholique, nous ne pouvons pas dire que nous assistons avec cet événement à la naissance de la France, et encore moins de la France chrétienne. Mais, ce fut un des éléments décisifs d'une évolution qui ne fait que commencer. Certains historiographes ne se gêneront d'ailleurs pas pour identifier le baptême de Clovis à la naissance de la France dont les dynasties successives surgissent mystérieusement du premier roi baptisé !

Extraits de : Claude Collignon, Supérieur du Séminaire interdiocésain de Reims,

« Autour du 15° centenaire du baptême de Clovis »,

dans Connaissance des Pères de l'Eglise n° 61, mars 1996, p. 6-7.

Annexe : L'expansion du royaume des Francs.

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