La culture de l'arbre de vie (SM 70-78)

La culture de l'arbre de vie

A la fin du « Secret de Marie », saint Louis-Marie compare Marie à l’arbre de vie, planté dans nos cœurs par le saint Esprit, et qui s’élève vers le Père des lumières, et porte pour fruit Jésus, fruit savoureux jusque dans son mystère pascal et dans son Eglise.

Cette parabole est splendide par son orientation générale vers la vie et vers la lumière.

Cette parabole met en valeur aussi de beaux équilibres, de beaux paradoxes :

L’Esprit Saint qui plante et qui cultive, et l’homme qui a lui aussi sa responsabilité.

L’homme est recueilli, dans une certaine solitude, puis les oiseaux du ciel se rassemblent, la communion naît.

Cette symbolique est simple, un enfant le comprendrait, c'est aussi une symbolique biblique qui parcourt la Bible de la Genèse à l'Apocalypse. (1)

70. Avez-vous compris, âme prédestinée, par l’opération du Saint-Esprit, ce que je viens de dire ? Remerciez-en Dieu ! C’est un secret inconnu de presque tout le monde.

Si vous avez trouvé le trésor caché dans le champ de Marie, la perle précieuse de l’Evangile, il faut tout vendre pour l’acquérir; il faut que vous fassiez un sacrifice de vous-même entre les mains de Marie, et vous perdre heureusement en elle pour y trouver Dieu seul.

Si le Saint-Esprit a planté dans votre âme le véritable Arbre de vie, qui est la dévotion que je viens de vous expliquer, il faut que vous apportiez tous vos soins à le cultiver, afin qu’il donne son fruit en son temps. Cette dévotion est le grain de sénevé dont il est parlé dans l’Evangile, qui étant, ce semble, le plus petit de tous les grains, devient néanmoins bien grand et pousse sa tige si haut que les oiseaux du ciel, c’est-à-dire les prédestinés, y font leur nid et y reposent à l’ombre dans la chaleur du soleil et s’y cachent en sûreté contre les bêtes féroces.

Voici, âme prédestinée, la manière de le cultiver:

71. 1 Cet arbre, étant planté dans un coeur bien fidèle, veut être en plein vent, sans aucun appui humain; cet arbre, étant divin, veut toujours être sans aucune créature qui pourrait l’empêcher de s’élever vers son principe, qui est Dieu.

Ainsi, il ne faut point s’appuyer de son industrie humaine ou de ses talents purement naturels, ou du crédit et de l’autorité des hommes: il faut avoir recours à Marie et s’appuyer [sur] son secours.

72. 2 Il faut que l’âme, où cet arbre est planté, soit sans cesse occupée comme un bon jardiner, à le garder et regarder.

Car cet arbre, étant vivant et devant produire un fruit de vie, veut être cultivé et augmenté par un continuel regard et contemplation de l’âme; et c’est l’effet d’une âme parfaite d’y penser continuellement et d’en faire sa principale occupation.

73. Il faut arracher et couper les chardons et les épines qui pourraient suffoquer cet arbre avec le temps ou l’empêcher d’apporter son fruit: c’est-à-dire qu’il faut être fidèle à couper et trancher, par la mortification et violence à soi-même, tous les plaisirs inutiles et vaines occupations avec les créatures, autrement crucifier sa chair, et garder le silence et mortifier ses sens.

74. 3 Il faut veiller à ce que les chenilles ne l’endommagent point. Ces chenilles sont l’amour-propre de soi- même et des ses aises, qui mangent les feuilles vertes et les belles espérances que l’Arbre avait du fruit : car l’amour de soi-même et l’amour de Marie ne s’accordent aucunement.

75. 4 Il ne faut pas laisser les bêtes en approcher. Ces bêtes sont les péchés, qui pourraient donner la mort à l’Arbre de vie par leur seul attouchement: il ne faut même pas que leur haleine donne dessus, c’est-à-dire les péchés véniels, qui sont toujours très dangereux si on ne s’en fait point de peine...

76. 5 Il faut arroser continuellement cet arbre divin, de ses communions, ses messes et autres prières publiques et particulières; sans quoi cet arbre cesserait de porter du fruit.

77. 6 Il ne faut pas se mettre en peine s’il est soufflé et secoué du vent, car il est nécessaire que le vent des tentations le souffle pour le faire tomber, que les neiges et les gelées l’entourent pour le perdre; c’est-à-dire que cette dévotion à la Vierge sera nécessairement attaquée et contredite; mais pourvu qu’on persévère à le cultiver, il n’y a rien à craindre.

78. Ame prédestinée, si vous cultivez ainsi votre Arbre de vie nouvellement planté par le Saint-Esprit en votre âme, je vous assure qu’en peu de temps il croîtra si haut que les oiseaux du ciel y habiteront, et il deviendra si parfait qu’enfin il donnera son fruit d’honneur et de grâce en son temps, c’est-à-dire l’aimable et l’adorable Jésus qui a toujours été et qui sera l’unique fruit de Marie.

Heureuse une âme en qui Marie, l’Arbre de vie, est plantée;

plus heureuse celle en qui elle est accrue et fleurie;

très heureuse, celle en qui elle porte son fruit [Jésus];

mais la plus heureuse de toutes est celle qui goûte et conserve son fruit [Jésus] jusqu’à la mort et dans les siècles des siècles.

Ainsi soit-il. Qui tenet, teneat.


(1) Cf. F. BREYNAERT,

L’arbre de vie, symbole central de la spiritualité de Saint Louis-Marie de Montfort</li

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, Parole et silence, Paris 2006. Thèse de doctorat.

Ou F. BREYNAERT, Marie, l’arbre de vie. Ed. Ver luisant, Brive 2007. (Diffusion Mediapaul). Une présentation simple et imagée, la proposition d’une prière gestuée.


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St Louis-Marie Grignion de Montfort

Le Secret de Marie, § 70-78