L’amour spirituel du prochain (Ste Thérèse d’Avila)

L’amour spirituel du prochain (Ste Thérèse d’Avila)

L'amour de la Vierge Marie a inspiré l'amour fraternel dans les couvents fondés par Thérèse d'Avila :

« Ainsi, mes filles, nous sommes toutes de la Vierge et sœurs, tâchons de nous aimer beaucoup les unes les autres. »[1]

Cet amour fraternel est appelé à être pur et généreux, orienté vers Dieu :

« Lorsque Dieu a donné à quelqu'un la claire connaissance du monde, qu'il lui a montré ce qu'il vaut, et qu'il existe un autre monde, et combien ils diffèrent l'un de l'autre, et que l'un est éternel tandis que l'autre est un songe, et ce qu'est aimer le Christ ou la créature [...] alors ces personnes rient d'elles-mêmes et du mal qu'elles se sont donné naguère pour savoir si leur affection était oui ou non payée de retour. [...]

Leur amour, donc, quand elles aiment, passe outre les corps, leurs yeux se fixent sur les âmes,, elles voient s'il y a quelque chose en elles à aimer ; s'il n'y a rien, mais si elles perçoivent une ébauche, des dispositions qui font espérer de découvrir de l'or en creusant cette mine, elles ne marchandent point leur peine. [...]

Ici, aimer, c'est la passion d'agir pour qu'une âme aime Dieu et en soit aimée ; car ces âmes savent que nul autre amour ne dure ; cet amour leur coûte très cher, elles font tout ce qu'elles peuvent pour qu'il soit un bienfait ; elles donneraient mille fois leur vie pour lui faire un peu de bien. ô précieux amour, à l'imitation du capitaine de l'amour, Jésus, notre bien ! »[2]

Cet amour fraternel est appelé à être tendre, compatissant :

« Il est bon de mêler parfois de la tendresse à l'affection, et mme d'en ressentir, et de compatir à certaines épreuves ou maladies, mêmes légères, des sœurs ; car il arrive que des choses très légères causent à l'une autant de peine qu'une autre en éprouverait d'une grande épreuve. [...] quand aux autres, celles qui désirent des épreuves, rien ne les abat, il leur est très nécessaire de se rappeler leurs moments de faiblesse, et de constater que si elles se sentent plus fortes, elles n'y sont pour rien ; sinon, par ce moyen, le démon pourrait refroidir leur charité à l'égard du prochain et créer la confusion entre cette faute et la perfection. »[3]


[1] Lettre aux moniales de Séville, 13 janvier 1580, 6

[2] Le chemin de la perfection, chapitre VI, § 3.7.8.9

[3] Le chemin de la perfection, chapitre VII, 5


Thérèse d'Avila (1515-1582)