Le père Éric Jacquinet aide depuis de nombreuses années les personnes souffrant d’addictions à s’en libérer. Auteur de Libre pour aimer, sortir de la pornographie (éditions de l’Emmanuel), il a donné plus de 40 conférences sur le sujet.
Les premières addictions ont été repérées au Moyen Âge, avec les jeux dans les tavernes. Ce n’est donc pas nouveau ! Aujourd’hui, on considère qu’il y a deux grands types d’addictions :
L’addiction est toujours une hyper-consommation. Or, il y a trois degrés dans la consommation : la consommation maîtrisée, la consommation excessive ponctuelle et l’addiction qui correspond à la perte de contrôle. En dernière analyse, on peut dire que l’addiction est un symptôme de souffrances relationnelles : je suis dépendant parce que les relations (à moi, aux autres, à la réalité) me font souffrir, alors qu’elles devraient me combler de joie.
L’addiction détourne de la finalité initiale : la recherche du produit addictif devient la finalité. Cela empêche le déploiement de ce que je suis et de ma mission sur terre. Le corps en souffre et la personne se retrouve à genoux, dans tous les sens du terme : elle est épuisée et son addiction devient un sujet d’adoration. D’un point de vue spirituel, l’addiction est une idolâtrie. Une addiction comporte quatre grandes caractéristiques : une dimension compulsive, une dimension d’accoutumance, une désensibilisation, un déni.
Pour s’en sortir, il faut un désir personnel, un déclic, et reconnaître son impuissance pour se libérer seul de ce mal et savoir qu’il y a une espérance possible. Et le chemin consistera à se battre pour la vie, pour la relation, pour le bonheur, mais pas contre l’addiction. Le thérapeute Victor Frankl, survivant de la Shoah, a construit sa logothérapie sur un fait simple. Dans le camp de concentration, il avait observé que tous les prisonniers qui s’en sortaient avaient un but dans leur existence. La personne qui souffre d’une addiction doit se demander quelle est sa finalité, son rêve, le but de sa vie et décider d’effectuer des petits pas dans cette direction. Et pour atteindre son but, la personne a besoin de croire qu’il est accessible. C’est l’espérance. Et,tout en étant déterminée, elle doit rester humble, connaissant ses faiblesses, pour les dépasser. Pour cela, elle aura besoin des autres. On ne se sauve pas tout seul.
Si l’addiction comporte une dimension psychologique, il y a aussi un aspect spirituel, car on confère à un produit ou à un mécanisme la possibilité de nous rendre heureux. Il y a un transfert de puissance : j’attends de cet objet un pouvoir, je le divinise. C’est un péché d’idolâtrie. Dans la Bible, l’idole est une petite statue de bois ou de pierre qui est divinisée, et dont on attend une bénédiction, un bien, une guérison, une protection. Ce qui est absurde et blasphématoire : Dieu seul bénit, guérit, protège, pas un morceau de bois ! Certaines addictions sont aussi liées à des péchés graves, comme l’adultère. Mais la paix, la joie, l’amour, le courage sont des dons du Saint-Esprit. (...)
Si l’on demande au Christ Jésus la grâce d’être libéré de ce lien mauvais, cela peut produire l’effusion du Saint-Esprit : la joie incroyable d’être sauvés peut nous transformer en apôtres et nous conduire à témoigner : « J’ai vécu le Carême pour me purifier et, après Pâques, j’ai été illuminé par l’amour de Dieu, comme une Pentecôte. »
Interview réalisée par Marie-Ève Bourgois
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