Lc 1, 35 : En Marie l'Esprit Saint crée un monde nouveau

Lc 1,35: En Marie, l'Esprit Saint vient créer un monde nouveau

La nuée ou l'Esprit, signe de la présence de Dieu

Dans l’Ancien Testament, la nuée est signe de la présence divine qui s’établit sur la tente de la rencontre (Es 40,35 ; Nm 9,18.22) ou guide Israël en marche dans le désert (Nm 10,36). Mais lorsque Isaïe relit ces passages de l’Exode et des Nombres, il convertit l’image de la nuée en l’Esprit du Seigneur : « L’esprit du Seigneur les guidait au repos » (Is 63,14).

Cette équivalence entre « Esprit de Dieu » et « nuée » semble pouvoir aussi être tirée de la comparaison entre Gn 1,2 « l’esprit qui planait sur les eaux » et Jb 38,9 où il s’agit de « la nuée ». Luc reçoit le symbolisme « Nuée/ Esprit » aussi bien dans le récit de la transfiguration (Lc 9,34) que dans le récit de l’Annonciation (Lc 1,35). Or, quand la nuée couvrit la tente de la rencontre, la gloire du Seigneur, Sa Shekina remplissait le lieu (Ex 40,35).

De même, Marie sur laquelle descend l’Esprit Saint est le lieu de la présence divine.

L’Esprit créateur

L'Esprit qui recrée un peuple

Dans l’Ancien Testament, l’Esprit est à l’œuvre pour recréer le peuple rescapé de l’exil (Is 32,15; Is 44,3; Ez 37,5-6. 9-10.14). Le retour des exilés sera une renaissance à la vie, presque une résurrection opérée par l’Esprit du Seigneur, un retour matériel et spirituel, une conversion. Et ce changement est comparé à l’exode égyptien et même à la création du monde (Is 51,9-10).

L'Esprit créateur qui plane sur les eaux

La généalogie de Jésus dans l’évangile de Luc commence avec Adam : Luc veut présenter Jésus comme le nouvel Adam. Sur la base de ce parallélisme, le haut moyen Âge a vu en Marie la nouvelle création vierge, comparée à Gn 1,2 : de même qu’à l’origine l’Esprit de YHWH planait sur la masse informe des eaux, pour éveiller la variété des êtres du cosmos, il couvre maintenant Marie pour faire germer en elle l’humanité du Fils de Dieu.

La conséquence de la descente de l’Esprit sur Marie est la germination d’un Être divin qui fut interprétée depuis l’antiquité chrétienne comme une nouvelle création. Ajoutons que Marie, loin d’être une créature inerte, est une personne libre, consciente, ouverte au dialogue avec son Dieu, le Dieu de l’Alliance.

L'humanité de Jésus

Dans cette nouvelle création, Jésus Christ est constitué Roi (Lc 1, 32-33) et principe archétype du peuple. Il porte le salut, la libération du péché et de la mort au moyen du baptême dans l’Esprit (Lc 3,16 cf. Ac 1,5). La maison de Jacob sur laquelle il est constitué Roi est le peuple de la nouvelle alliance, réplique des douze tribus de l’ancien Israël (Lc 22,20.30) et qui embrasse tous les peuples (Lc 2,31; 3,6), Juifs et Gentils (Lc 2,32).

L’Esprit qui descend sur la Vierge est l’Esprit créateur, Celui qui fut à l’œuvre dans la création du monde et dans la renaissance de l’ancien peuple de Dieu. Maintenant il crée l’humanité du Christ ; et le Christ, en vertu du même Esprit, réalisera la seconde création, qui consiste dans le renouvellement eschatologique du peuple de Dieu dont il est le commencement, le Roi et le Seigneur.


Cf.A. SERRA, E C'era la madre di Gesù, saggi di esegesi biblico-mariana (1978-1988), ed. Cens-Marianum.

Synthèse F. Breynaert.

A. Serra (Marianum, Rome)