La divinité de Jésus dans l'Évangile selon saint Jean

Jean : une christologie plus haute ?

L'évangile de Jean semble a bien des égards différents de Luc, Matthieu et Marc. Il semble aussi que l'affirmation de Jésus comme Fils de Dieu, égal du Père, préexistant à la création soit une affirmation plus explicite. L'évangile de Jean a-t-il donc une christologie « plus haute » que celle de ses prédécesseurs ?

Selon Hurtado, Jean n'innove rien, mais il insiste davantage, à cause de la controverse plus vive avec les Juifs qui considèrent que l'adoration de Jésus est une offence au monothéisme.

En Jean, la divinité de Jésus et sa préexistence sont explicitement l'objet de la controverse. Dans les autres évangiles, la controverse porte sur le pardon des péchés, le sabbat etc. Mais déjà dans les premiers évangiles, la véritable question sous jacente est l'autorité de Jésus[1].

On trouve en saint Jean l'idée que Jésus est le Fils unique de Dieu (Jn 1, 14. 18 ; 3, 16. 18 ; voir aussi 1Jn 4, 9), mais ce n'est pas une innovation, la lettre aux Romains, beaucoup plus ancienne, l'exprime déjà explicitement : Dieu nous a destinés à « reproduire l'image de son Fils, afin qu'il soit l'aîné d'une multitude de frères. » (Rm 8, 29)[2]

A l'occasion du pardon des péchés en Marc 2, 7 // Mt 9, 3 // Lc 5, 21 et de la comparution devant le sanhédrin en Mc 14,64// Mt 26,65, les opposants juifs considèrent que Jésus a transgressé le respect dû à l'unicité de Dieu.

« Dans les récits de la comparution de Jésus en Matthieu et Marc, les revendications christologiques fondamentales qui font l'objet de controverse dans Jean (messianité et filiation divine) sont désignées comme blasphématoires.[3]

En conséquence, et bien que je reconnaisse volontiers que les revendications christologiques de Jean portent très probablement la marque des controverses avec des adversaires juifs, je trouve que ces marques se détectent dans le ton agressif et dans l'insistance sur ces affirmations plutôt que dans leur teneur. » [4]

Citons aussi le saint Père :

« Jésus se conçoit lui-même comme la Torah, comme la Parole de Dieu en personne. Le majestueux prologue de l'Evangile de Jean - "Au commencement était le Verbe, la Parole de Dieu, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu" ne dit rien d'autre que ce qu'affirme Jésus dans le sermon sur la montagne et dans les synoptiques. »[5]


[1] Cf. Larry W. Hurtado, Le Seigneur Jésus Christ, La dévotion envers Jésus aux premiers temps du christianisme. Cerf, Paris 2009, p. 417

[2] Cf. Ibid., p. 421

[3] Cf. R.E. Brown, Thee Death of the Messiah, From Gethsemane to the Grave : A commentary on the Passion Narratives in the Four Gospels, 2 vol. New York, Doubleday, 1994. (Bayard, Paris 2005).

[4] Cf. Larry W. Hurtado, Ibid., p. 420-421

[5] JOSEPH RATZINGER, BENOIT XVI, Jésus de Nazareth, Flammarion, Paris 2007, p. 133


Synthèse F. Breynaert