Notre-Dame du jardin clos (Hortus conclusus)


Dans la région d’ Hébron, près du village d’Urtâs (ou Artas), au fond d’une vallée, se trouve un jardin verdoyant qui forme un contraste saisissant avec l’aridité des collines environnantes. Ces jardins sont de ce fait quelquefois attribués à Salomon, qui rapporte dans l’Ecclésiaste tout ce qu’il a réalisé, dans sa recherche de la sagesse.

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Un jardin verdoyant

La voix d’outre-tombe de Salomon s’exprime dans l’Ecclésiaste[1] pour rendre compte de sa recherche de la sagesse, à travers différentes réalisations qui ne lui ont pas procuré le bonheur attendu. L’une de ses expériences est celle de l’aménagement de jardins et de parcs :

 « Je me suis aménagé des jardins et des parcs et j’y ai planté des arbres fruitiers de toutes sortes. Je me suis fait des bassins pour irriguer des pépinières où croissent des arbres[2] »

Certains pensent que l’aménagement de cet endroit exceptionnel d’Urtâs, dont les jardins verdoyants au fond de la vallée contrastent avec les collines avoisinantes, est l’une des œuvres de Salomon relatées dans l’Ecclésiaste. Selon le linguiste orientaliste britannique Guy Le Strange (1854 – 1933), le mot ‘Urtas’ ou ‘Artas’ provient du latin ‘Hortus’, qui veut dire jardin.

Un lieu marial

C’est dans cet endroit paradisiaque, de l’autre côté de la vallée du village d’Artas, que s’élève une gracieuse chapelle appelée Notre-Dame de l’ « Hortus conclusus » (le jardin clos)[1]. En 1894, les sœurs de Marie du jardin construisirent en effet un couvent à Artas. Elles rattachent ainsi ce lieu au passage du Cantique des Cantiques attribué à la Vierge Marie :

 « Tu es toute belle, mon amie, et il n’y a pas de tâche en toi… Tu es un jardin clos, ma sœur, mon épouse, un jardin clos, une fontaine scellée. »[2] 

Le mystère de la Vierge Marie « jardin clos »

 C'est sans doute le théologien liégeois saint Rupert de Deutz (†1130), très proche des sources juives, qui parla le mieux du mystère de la Vierge Marie "jardin clos", dans son Commentaire du Cantique des cantiques[3] . Il fait parler ainsi le Christ :

« En descendant dans ton sein et en assumant ta chair, pour naître comme vrai homme, moi qui étais Dieu, je suis venu dans mon jardin… En descendant, je dis dans ton sein je suis devenu homme, je suis venu dans mon jardin. Qu’y a-t-il qui ne soit pas à moi ? En vérité, Moi, je suis le Verbe, par lequel toutes choses sont faites et sans moi rien n’est fait (cf. Jn 1,1-3)

Et, plus loin :

"Par moi a été planté ce jardin dont l’Écriture dit "Le Seigneur Dieu a été planté un jardin de délices aux commencements" (Gn 2,8 vulgate) Et tu es l’autre jardin, le jardin fermé (Ct 4,12). Certes le premier homme ne pouvait pas dire "Je suis venu dans mon jardin." Ce premier homme je veux dire, duquel il est écrit "Le Seigneur Dieu prit l’homme et le mis dans le jardin des délices pour qu’il cultive et le garde" (Gn 2,15). Ce ne fut pas lui qui créa et planta le jardin, ni lui qui fut créé dans le jardin. Moi, au contraire, j’ai fait le jardin et dans le jardin je suis né. Autrement dit, j’ai fondé la cité et dans la cité je suis né, comme l’Écriture dit : "Un homme est né en elle, et le Très haut l’a fondé" (Ps 86,5). » (2)

Saint Rupert de Deutz associe l’image de la cité-Sion (Ps 86,5) à celle du jardin planté dans le Christ et où le Christ vient (Gn 2,8 ; Ct 4,12). Cette cité-jardin, c’est Marie.

La Vierge Marie, un ‘jardin fermé’ (Hortus conclusus

La virginité de la Vierge Marie est signifiée par le symbole du jardin fermé. Le fait que le Christ vienne en Son jardin, c’est à dire dans le sein de Marie, symbolise l’Incarnation.

La symbolique de la cité Sion

En outre, la Vierge Marie est située dans le dessein de Dieu créateur à travers la symbolique du jardin de la Genèse, et dans le plan de l’histoire du salut par la symbolique de la cité Sion. Saint Augustin parle ainsi de Sion[4] :

« De la cité un psaume dit : "Sion ma Mère, dira l’homme, et l’homme est né en elle, et le Très-Haut lui a donné de solides fondations "(ps 86,5). Le Très-Haut est certainement Dieu. Le Christ Dieu, avant qu’en cette cité il ne devienne homme en Marie, lui donna lui-même de solides fondations dans les patriarches et les prophètes. »

Enfin, l’image de la cité Sion ouvre une perspective universelle car toutes les nations y viendront. Tertullien nous dit en effet[5] que Sion, c’est-à-dire Marie en tant que Mère de Jésus, est également la Mère de tous les peuples, même païens, car elle est bâtie par le Christ selon la volonté du Père. 

 

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Pour en savoir plus

Sur le jardin clos, figure de Marie, dans l'Encyclopédie mariale

Sur la femme immaculée du cantique des cantiques, annonce de la Vierge Marie, dans l’Encyclopédie mariale 

Sur le Commentaire du Cantique des cantiques de Rupert de Deutz, dans l’Encyclopédie mariale

Sur Le thème iconographique marial de l’ ‘Hortus conclusus’ 

Françoise Breynaert et équipe de MDN