La prise de Jérusalem (Jg 1)

L'entrée en Canaan (autres sources archéologiques)

Prise provisoire de Jérusalem après la mort de Josué : vers 1350.

D'autres éléments utiles au débat sur l'apparition d'Israël au proche-Orient se trouvent également en Egypte, dans la cité égyptienne de Tell el-Amarna qui fut fondée par le pharaon Aménophis IV-Akhenaton (1353-1338 av. J.-C.). En 1887, une paysanne exhuma par hasard à Tell el-Amarna une grande quantité de documents anciens, constituée de près de quatre cents tablettes d'argile recouvertes de caractères cunéiformes gravés. Ces documents de provenance asiatique, inscrits en akkadien, constituent la correspondance échangée par le roi Akhenaton avec ses vassaux du Proche-Orient. Il s'agit essentiellement de lettres envoyées par les roitelets cananéens, qui se plaignaient d'être exposés aux attaques de leurs voisins et demandaient l'intervention du puissant roi d'Egypte.

Quelques-unes de ces lettres viennent de Jérusalem, dont le roi est menacé d'une invasion de Canaan par des "Sheshou" venant de Transjordanie et qui auraient contourné Jérusalem en menaçant de prendre la ville. L'une des tablettes indique que la ville a finalement été prise, et son roi tué. Le nom de Jérusalem est écrit sous la forme Uru-Salim, ce qui signifie "cité de Salim" selon son appellation première, et son roi porte un nom hittite, Abdi-Khepa[1]. Une autre tablette assez fragmentaire semble citer le nom d'un certain Josué, dans un contexte difficile à préciser.

Les envahisseurs décrits dans les lettres d'Amarna seraient-ils les colons israélites ? D'après le livre des Juges, Jérusalem fut effectivement prise par les Hébreux une première fois peu après la mort de Josué (Jg. 1, 8). Si le siège de Jérusalem dont parlent les archives d'Amarna est réellement le fait des Hébreux, cela situe leur invasion de Canaan autour de 1350 av. J.-C., date qui plaide pour une chronologie relativement ancienne de la conquête, c'est-à-dire sous la XVIIIème dynastie.

Continuation des migrations d'un groupe ethnique appelé « Israël ».

Tous les archéologues reconnaissent que la Palestine connut au XIIIème siècle av. J.-C. une transition culturelle importante. Les couches archéologiques montrent les signes d'une "crise de civilisation", au cours de laquelle une culture laisse progressivement la place à une autre[2]. Le nouveau mode de vie qui se met en place en Canaan est plus primitif que l'ancien, la tendance étant à la désorganisation et à la nomadisation.

La transition culturelle, nettement perceptible dans les résultats des fouilles, se produit d'abord dans les régions montagneuses de l'est, éloignées du littoral[3]. On constate sur le terrain que la nouvelle société possède ses caractéristiques propres. Ainsi, le plan intérieur des habitations présente des piliers et des cours intérieures selon une disposition appelée "maisons à quatre pièces". Les demeures sont parfois accolées entre elles pour former une sorte d'enceinte ovale, comme à Izbet-Sartah, évoquant le schéma d'un enclos agricole fermé.

La stèle de Mineptah vers 1208 avant notre ère : la mention d'Israël comme peuple en migration en Canaan.

L'identité nominative du peuple nouvellement installé en Canaan au XIIIème siècle av. J.-C. n'apparaît pas de façon explicite dans les fouilles effectuées en Israël. C'est vers l'Egypte qu'il faut se tourner pour obtenir des informations complémentaires. Un élément majeur relatif à l'émergence d'Israël en Canaan a été découvert en Haute-Egypte, dans une nécropole royale implantée à l'ouest de Thèbes. En fouillant en 1896 les ruines du temple funéraire du pharaon Mineptah, l'archéologue anglais Flinders Petrie exhuma une imposante stèle de granite, haute de plus de trois mètres et gravée d'un long texte hiéroglyphique. Elle porte une déclaration du roi d'Egypte dans laquelle le monarque affirme avoir anéanti plusieurs Etats de Syrie-Palestine, parmi lesquels celui d'Israël[4]. Le passage concerné se lit de la manière suivante :

"Leurs chefs se prosternent et implorent la paix :

Canaan est dévasté,

Askhelon est vaincu,

Gezer est prise,

Yenoam est annihilé,

Israël est dévasté, sa semence n'est plus,

la Syrie est devenue veuve pour l'Egypte

et tous les territoires ont été pacifiés"

Il s'agit de la plus ancienne mention du mot "Israël" apparaissant dans un document non biblique. La traduction correcte du mot "Israël" ne fait aucun doute, car il est suivi d'un groupe de hiéroglyphes déterminatifs signifiant "peuple" (un homme et une femme, plus trois traits). Mineptah, successeur immédiat de Ramsès II, régna de 1213 à 1203. Cette pierre est auto-datée de l'an 5 de son règne, c'est-à-dire vers 1208 avant notre ère. Elle atteste par conséquent qu'à cette date, les Israélites étaient déjà présents en Palestine en tant que groupe ethnique.

Un détail particulièrement significatif figure sur l'inscription et accroît encore son intérêt. A la différence d'Israël, les noms des autres peuples cités dans le même texte sont suivis du signe déterminatif du territoire (hiéroglyphe figurant trois collines). Ainsi, il est clair que le scribe a délibérément fait la différence entre les peuples déjà établis et le peuple israélite encore migrant. Force est donc de reconnaître la présence historique d'un groupe de nomades appelé Israël en Orient à la fin du XIIIème siècle[5].



[1] "El Amarna Letters. Could these tablets contain records of Joshua and the Hebrews conquering the land of Canaan ?" (bible-history.com).

J. Orr : "The Jebusites - Encyclopedia" (bible-history.com).

[2] P. de Miroschedji : "Terre promise, conquête de légende". La Recherche n° 391, novembre 2005.

[3] A. Zertal : "Israel Enters Canaan-Following the Pottery Trail". Biblical Archaeology Review, 17 No 5, 28-49, 75, 1991 (wwuheiser.com).

[4] M.G. Hasel : "Israel in the Merneptah Stela". Bulletin of the American Schools of Oriental Research, No. 296 (Nov. 1994), pp. 45-61.

[5] R.D. Miller II : "Identifying Earliest Israel". Bulletin of the American Schools of Oriental Research, No. 333 (Feb. 2004), pp. 55-68.

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