Le roi David, l'émergence de l'Etat d’Israël

L’émergence de l’Etat d’Israël et le roi David

L'émergence de l'Etat d'Israël [1]

L'Ecriture est apparue, ou du moins ne s'est répandue, que lorsqu'il y a eu des Etats avec des fonctionnaires. C'est pourquoi l'Ecriture ne peut raconter l'émergence d'un Etat que rétrospectivement. Rémi Brague en parle comme d'un traumatisme :

La Bible place dans la bouche du prophète Samuel, à qui le peuple est venu demander un roi une tirade très négative qui annonce que le roi, pourtant voulu et acclamé par le peuple, soumettra le peuple au service militaire, à la dîme, à la corvée... Il blessera l'unité organique du peuple en mettant à part une classe de fonctionnaires (1Sam 8, 11-17). Littéralement :

« Il soumettra à la dîme vos semences et vos vignes et les donnera à ses eunuques et à ses esclaves » (1Sam 8, 15).

L'Etat donne la semence à celui qui ne peut plus en produire. Le temps naturel des semailles et des moissons, de la reproduction, le cède au temps abstrait cumulatif, des archives et des chroniques.

La raison d'Etat est aussi un traumatisme pour le chef. Quand l'armée de David tue Absalon le fils rebelle de David, le roi David gémit et les soldats vainqueurs rentrent à Jérusalem comme s'ils étaient vaincus... (2 Sam 19, 1-9).

La critique de la royauté

1 Sam 8, 11-17 est assurément une critique de l'institution royale.

En ce temps-là, on trouve un peu partout, en Egypte, en Grèce, au Proche Orient, des critiques adressées à des souverains concrets, mais ce n'est qu'en Israël qu'une critique de l'institution royale apparaît comme telle.

Au fond, cette critique de la royauté insiste sur ce point : le seul vrai roi d'Israël est YHWH le Seigneur. Citons un verset :

« Cependant, lorsque vous avez vu Nahash, le roi des Ammonites, marcher contre vous, vous m'avez dit : Non ! Il faut qu'un roi règne sur nous. Pourtant, le Seigneur votre Dieu, c'est lui votre roi ! » (1Sam 12, 12, lire aussi : 1 Sam 8, 7)

La royauté

Toujours est-il que David (et déjà avant lui Saül), reçoit une onction sacrée (1 Sam 16). Et

« L'esprit du Seigneur fondit sur David à partir de ce jour-là et dans la suite. » (1Sam 16, 13)

Dieu fait un don au roi, un don de son Esprit Saint. L'Esprit Saint n'est pas uniquement sur les prophètes et les prêtres, il est aussi sur le roi. L'institution, la structuration de la société, tout cela aussi est bon et béni de Dieu.

Cette institution n'est pas évidente. Nous l'avons dit, si dans le peuple certains désirent avoir un roi comme tout le monde, certains résistent, car ils ont trop connu l'oppression des rois cananéens, dont YHWH les a délivrés... Aussi le roi devra-il obéir à Dieu (1 Sam 8, 11-17).

De la royauté de David a l'attente messianique...

Bien qu'il ait reçu l'onction, la Bible raconte les péchés du roi David :

David commet l'adultère avec la femme d'Urie qui est parti au combat, ce faisant, David ne respecte pas non plus les lois de la guerre (2 Sam 11, 27).

David collabore avec les Philistins (1 Sam 21), ou encore, il dénombre le peuple (2 Sam 24), s'appuyant ainsi sur soi plus que sur le Seigneur.

Au long de l'histoire va grandir le désir d'un roi sage et rempli d'Esprit Saint (Isaïe 11), et finalement l'attente que YHWH vienne lui-même régner.


[1] Rémi Brague, la Loi de Dieu. Gallimard, Paris 2005, p. 80-81


Synthèse F. Breynaert