Depuis une quarantaine d’années, la principale voie religieuse du sous-continent indien attire les regards des occidentaux, tentés par des expériences exotiques sans engagement et sans lendemain, ou malheureux dans le contexte matérialiste et hédoniste de notre époque. En particulier, le « yoga » et, dans une moindre mesure, la « méditation », liées à l’Hindouisme, font actuellement office de « valeurs » sûres auprès des Européens. Mais il s’agit d’une vision très réductrice de l’Hindouisme : yoga et méditation (« transcendantale » en particulier) sont appréhendés comme de simples techniques de développement personnel, des thérapies anti-stress, sans rapport avec la religion hindouiste. Or, la réalité est autre. L’Hindouisme et le yoga véhiculent une conception de la religion, de l’homme et de la société incompatible avec la foi chrétienne.
L’Hindouisme ignore toute révélation. Au contraire, son socle historique est une tradition orale très ancienne, remontant à la proto-histoire indienne, soit au moins trois millénaires avant notre ère. À l’époque, Dieu ne se manifeste pas dans cette partie du monde comme Il le fit en Terre Sainte ; la tradition hindouiste la plus ancienne mentionne simplement un fonds animiste dans lequel des « forces » surnaturelles cohabitent avec les hommes et la nature et où certaines personnes jouissent de facultés rares leur permettant d’entrer en contact avec le monde des « esprits », en particulier les fameux « Rishi » (les « voyants »), soi-disants instruits par Brahma à la
Cette tradition est rapportée par les quatre « Védas », considérés comme des textes fondateurs par une majorité d’Hindouistes. En fait, ce vieux fonds animiste, semblable aux formes d’animisme répandus à travers le monde (Afrique centrale, Asie du Sud-Est, etc.), n’est ni révélation de Dieu ni évolution spirituelle, mais simple inscription narrative et description littéraire de croyances alors en vigueur parmi les peuples du sous-continent indien.
Dans la Bible, le passage du Judaïsme au Christianisme est évolution et révolution. Par exemple, les premiers chrétiens s’interrogent : les baptisés doivent-ils continuer à respecter la loi juive ? Dans l’Hindouisme, rien de cela : la meilleure tradition est la plus antique, et le reste est sans valeur.
Dans cette perspective, il est étrange d’observer que les Védas soient parfois surnommés « ce qui est révélé ».
En effet, il ne s’agit pas le moins du monde d’une révélation : ces textes décrivent un univers en deux segments, réparti entre sphère divine et sphère humaine, bien qu’interpénétrés. Ici, la transcendance n’existe pas non plus : Dieu et le surnaturel - bien que dans l’Hindouisme, ces deux termes n’aient pas grand sens - ne sont pas étrangers à l’humanité, mais intrinsèquement mêlés à notre nature ; en un mot, bien que jugés « supérieurs » à notre condition, les divinités hindouistes règnent en maître sur la vie terrestre, non dans un esprit d’amour, mais à l’image de souverains temporels.
Le meilleur exemple est celui du Gange, fleuve « sacré » considéré comme la chevelure de Shiva tombée sur terre. Les 330 millions de divinités peuplant le panthéon hindouiste exercent une influence sur toutes les facettes de l’existence et sur tous les domaines de la pensée, sans compter leurs innombrables variantes locales : stabilité de l’univers, marche des astres, santé, destin des sociétés et des individus, organisation sociale, mariage, statut des femmes, sexualité, réussite économique…
En chacun de ces aspects, l’homme demeure étranger à sa propre existence ; soumis à la volonté de cette multitude de divinités, il ne peut ni n’a le pouvoir d’orienter le sens de sa vie. Dans l’Hindouisme, le « ciel » règne en maître.
Au contraire, l’Hindouisme soutient une vision profondément inégalitaire du monde. Selon lui, les êtres humains ne sont pas les créatures bien-aimés de Dieu, mais les serviteurs et les adorateurs du « divin », en priorité Brahma, Vishnu et Shiva. Plus encore, l’Hindouisme a une conception cyclique du temps : l’homme aurait non une seule vie mais d’innombrables. Son destin est tragique car il serait soumis à la réincarnation qui, contrairement à ce qu’affirme une certaine présentation « exotique » de l’Hindouisme en Europe, est perçu comme profondément aliénante. Dans l’Hindouisme, au bon vouloir des divinités, l’être humain peut se voir rétrograder en animal, en insecte, ou en n’importe quelle forme de matière vivante.
C’est le système des castes par lequel des hommes sont considérés comme définitivement indignes de figurer parmi les couches élevées de la société, des personnes par conséquent condamnées par leur naissance aux conditions les plus serviles : la religion hindouiste prône un « ordre socio-cosmique éternel » ! C’est aux « intouchables » que reviennent les travaux les plus dures et les plus ingrats, sans aucune espérance de changement de leur condition. À ce stade, il s’agit de fatalisme contraire à l’Évangile : « Heureux les pauvres... »
Que faut-il comprendre ? Situant l’origine géographique et culturelle de l’humanité dans le sous-continent indien (ce qui, au passage, est bien sûr totalement faux), les peuples extérieurs à ses zones d’influence seraient étrangers à la protection des divinités. Bref, ce qui ne ressort pas à l’Hindouisme serait foncièrement mauvais. Nous sommes ici éloignés des belles pages écrites par les Pères du concile de Vatican II sur la présence de l’Esprit Saint au sein de nombreuses civilisations…
Ces dieux tutélaires desquels découlent et dépendent la plupart des autres figures spirituelles hindouistes mais il ne faut pas parler de « Sainte Trinité » hindouiste !
Il est en effet impossible de comparer le Dieu trinitaire de Jésus Christ et cette triade. La Révélation biblique est celle d’un Dieu, transcendant qui, en son essence, est Père, Fils et Esprit Saint : non pas trois « entités divines » mais un seul et unique Dieu en trois Personnes. C’est très différent du schéma hindouiste où il s’agit bel et bien de trois dieux distincts, possédant chacun une identité propre, un « vécu » particulier, des traits distincts selon les textes traditionnels. Ce qui rapproche les trois dieux de l’Hindouisme, c’est leur odyssée mythologique décrite par les prêtres de cette religion : une saga étrangère à la vie et au coeur humain. Le Dieu de Jésus Christ est parole d’amour donnée aux hommes.
Elle l’est depuis ses plus lointaines origines et se déclare comme telle depuis sa fondation. C’est même du polythéisme que tirerait l’Hindouisme toute sa valeur selon la doctrine des Véda. À tel point que le vocable « Hindouiste » ne fut inventé qu’au XIXe siècle !
Dans la Bible, Dieu se révèle à l’humanité non pour asseoir une quelconque autorité, mais pour l’inviter à l’aimer, Lui, l’amour parfait, et, à travers Lui, à aimer tous les hommes en vérité. Un tel cheminement n’existe pas dans l’Hindouisme ; dès le départ, les cadres sont fixés : au-dessus des hommes trônent - impassibles et insensibles - les dieux multiples. Un quelconque rapprochement - et, à fortiori, une communion entre ces deux mondes est très exceptionnelle. La notion de grâce n’existe pas ; seule domine la volonté de puissance des divinités.
On distingue deux périodes successives dans l’Hindouisme : le védisme (environ 1500-500 avant notre ère) puis le brahmamisme, 500 ans avant notre ère. En fait ces deux phases chronologiques ne traduisent aucune évolution, aucun changement dans les relations des hommes aux dieux hindouistes. Elles ne constituent ni une « montée » spirituelle ni une histoire d’amour entre le Créateur et les hommes, amour s’intensifiant, dans le Christianisme, jusqu’au point d’atteindre un point absolu dans le Christ.
Fréquemment comparé à l’incarnation chrétienne, l’avatar n’a en réalité rien à voir. Dans le Christianisme, le Fils de Dieu s’incarne en Jésus : Dieu en son Fils assume la totalité d’un être humain, hormis le péché. Il s’agit d’un « abaissement » de Dieu (la kénose) afin que l’homme puisse s’élever jusqu’à Lui, communier à ses mystères, et L’aimer en chacun de ses semblables. Dans l’Hindouisme, rien de semblable : tel ou tel dieu « descend » jusqu’à entrer en contact avec un être humain, non dans un amour et dans l’espérance, mais dans un rapport de domination. Le mot « incarnation » ne convient pas ; il serait juste de parler de « tournée d’inspection » des dieux ici-bas, sinon de gestes et de paroles intrusives.
D’autant que la tradition védique admet la possibilité d’un avatar partiel, limité, comme si les dieux n’admettaient qu’une entrée parcellaire dans l’ordre terrestre et, en particulier, dans les corps humains, à la manière dont les démons prennent possession des personnes dans la tradition judéo-chrétienne. L’Hindouisme possède des ressemblances frappantes avec le chamanisme.
Il s'agit d'une croyance qui ne cherche pas à montrer qu'elle est vraie par des preuves et des raisons de croire comparables à celles que donne le Christianisme. La foi et la raison sont dissociées.