Livias : Théotecno et l’Ascension de Marie

Théotecno de Livias et l’Ascension de Marie

Contexte géographique

Livias est une ville proche de la Mer Morte, au-delà du Jourdain, sur une colline au-dessus de la plaine de la Jéricho. Cette ville est mentionnée deux fois dans la Bible (Nombres 32:36; Josué 13:27) sous le nom de Betharan. Aujourd’hui Livias est connue sous le nom de Teller-Rameh.

Contexte historique

Vers l'an 600, l'empereur Maurice décréta que serait célébrée le 15 août « la Dormition de Marie » dans tout l'empire, avec la plus haute révérence en observant tout le repos festif.

Qui dit liturgie, dit aussi homélie.

L’homélie de Théotecno sur l’Assomption de Marie au ciel constitue une des premières, sinon la première homélie composée pour ce mystère, vers l'an 600.

L’homélie de Théotecno sur l’Assomption de Marie

Théotecno de Livias donne à la fête une dénomination nouvelle par rapport à la précédente (Dormition) : il appelle "analepsis" : Ascension. Il utilise la terminologie qui est celle utilisée aussi pour l’Ascension du Seigneur. L’Assomption serait arrivée après la mort corporelle qui n’aurait pas connu la corruption.

Comme dans les apocryphes,

l’Assomption est une liturgie sur la terre et dans le ciel.

En suivant fidèlement les apocryphes, Théotecno raconte comme l’événement s’est déroulé sous la forme d’une liturgie terrestre et céleste grandiose, avec la participation d’êtres humains comme les apôtres et les disciples, mais aussi de créatures célestes.

Tous ne cessaient d’adresser des hymnes de louange à Dieu pour tout ce qu’il avait accompli en sa Mère et à exalter la Vierge elle-même pour la vie de sainteté sublime qu’elle avait mené sur cette terre et qui maintenant trouvait son épilogue évident dans la gloire de son Assomption au ciel.

Pendant que son corps était transporté du mont Sion à Gethsémani, vinrent des habitants de Judée pour déshonorer et profaner le corps saint de la Mère du Seigneur en le jetant du mont Sion et en le brûlant; mais ils furent frappés de cécité. L’un d’eux réussit à toucher le cercueil, il eut les mains coupées. Devant cette punition prodigieuse, les Juifs finirent par reconnaître en Marie la Mère de Dieu et par la louer comme les croyants ; de sorte qu’ils furent guéris (cf. n°19-20).

Entre temps les apôtres veillaient le corps très saint, selon le commandement reçu par le Seigneur, quand soudain ils entendirent un bruit de tonnerre et de tremblement de terre et ils virent la Vierge monter au ciel, où elle prit place à côté de son Fils, retrouvant ainsi ce qu’Ève avait perdu (cf. n° 24).

Théotecno donne des références bibliques

Théotecno a recherché des références bibliques qui illustrent et donnent une plus grande signification à la vérité de l’Assomption de la Vierge :

- Jésus avait promis à ses apôtres qu’il serait allé leur préparer une place au ciel (Cf Gv 14,2) ; à plus forte raison il devait préparer une place à sa Mère (Cf n°10).


- Les prophètes Enoch et Élie. S’ils furent emportés au ciel, à plus forte raison Dieu a élevé en son corps et son âme celle qui fut proclamée bienheureuse entre les prophètes (Cf n°13-14).


- La ceinture laissée par Marie est une analogie avec le manteau laissé par Elie (Cf. Chalcoprateia, sanctuaire de Turquie).


- Si Jésus a ouvert d’une parole le paradis au larron repenti, il ne pouvait pas faire moins avec Marie sa Mère (Cf n°3). Par analogie avec la vie du Fils qui fut marquée de la souffrance et de la gloire, de même, la vie de Marie, marquée par la douleur, devait se terminer dans une joie ineffable (Cf n°7).


- Une autre analogie biblique, mais de caractère antithétique, peut être l’application du parallélisme classique Ève-Marie. Le comportement différent des deux femmes semble sous-entendre que leur sort aussi devait être différent : si Ève fut exclue du paradis, Marie devait y rentrer et être une garantie de salut pour tous (Cf n°4).

Théotecno donne des fondements dogmatiques

Marie a donné un corps au Fils de Dieu ; il a demeuré en son sein ; Marie a été l’arche, le temple, le tabernacle dans lequel le Seigneur a pris domicile. Une dignité semblable explique sa glorification finale.

Sa virginité et sa sainteté extraordinaire, inséparables pour les premiers chrétiens, expliquent que son corps eût une espèce d’exigence à être préservé de la corruption du sépulcre.

Conclusion

L’évêque de Livias affirme la vérité de l’Assomption avec une clarté et une sûreté sans aucun doute ni hésitation. Un sentiment de ce genre ne s’explique que pour celui qui détient la possession paisible d’une vérité non contestée. Parfois une église locale peut avoir, sur une vérité de foi, une vision de grande clarté et de plus grande sûreté que l’ensemble de l’Église universelle. D’autres témoignages historiques existent selon lesquels, autour au VII° siècle, cette église célébrait déjà la fête de l’Assomption de Marie.

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Le Migne n’a pas ce texte qui n’a été découvert que récemment.

A. WENGER L’Assomption de la Très Vierge dans la tradition bizantine du VIe au Xe siècle, Paris 1955, 96-110 (presentazione dell’omelia), 271-291 (testo critico greco e traduzione francese) ; Id., Aux origines de la croyance en l’Assomption. L’homélie de Théoteknos de Livias en Palestine (fin du VIe-debut du VIIe siècle), in De primordiis cultus mariani, IV, 327-339.

La traduction italienne in Testi Mariani del Primo Millennio, vol. II, pp. 8 l –87; ou in M. De Rosa, La Dormizione vitale della Madonna, Atessa 1976, pp.71-78.

L.Gambero

N.B. Pour les francophones, ces données ont été reprises et publiées dans :

F. Breynaert, A l'écoute de Marie, préface Mgr Rey, tome II, p. 174-176