Sainte Anne

Marie de Nazareth

Icône: sainte Anne portant la Vierge Marie

Sainte Anne-dont le nom signifie la gracieuse, celle qui a obtenu grâce- est la mère de la Vierge Marie et la grand-mère de Jésus. Son nom n’est pas mentionné dans les Évangiles, mais dans plusieurs écrits apocryphes, la plus ancienne source étant le Protévangile de Jacques, daté du IIe siècle. Cette tradition du Protévangile de Jacques s’est propagée à travers divers écrits, jusqu’à la Légende dorée de Jacques de Voragine au XIIIès, qui a permis la diffusion de la dévotion à sainte Anne dès le XIVès.

Les mentions de sainte Anne et saint Joachim sont liés au thème de l’enfance de la Vierge Marie, et à l’attention donnée à la généalogie maternelle de Jésus.

Sainte Anne et saint Joachim sont invoqués en tant que grands-parents, pour les époux âgés, pour la famille,  pour la fécondité, et sainte Anne est également invoquée par les marins et les malades. Elle est la sainte patronne des mères de famille.

La vie de sainte Anne selon la tradition

Les parents de sainte Anne se nomment Akar (Isachar dans le Pseudo –Matthieu) et Émérencie. Sainte Anne est née à Bethléem, aux environs de l’an 55avant notre ère, puis a vécu à Jérusalem avec ses parents dès sa jeunesse, son père étant responsable du Temple. Sainte Anne y a rencontré et épousé Joachim.

L’histoire de sainte Anne et saint Joachim , telle qu’elle est rapportée, est celle d’un couple longtemps éprouvé par la honte qui s'attachait à la stérilité. Saint Joachim, fils de Mathat, de la tribu de Juda, homme riche et pieux, descendant de la lignée du roi David et né à Nazareth, et son épouse sainte Anne, de la tribu de Lévi, également de la descendance de David, étaient en effet privés de descendance. Après vingt années de vie commune, sainte Anne n’était plus en âge de procréer.

C’est alors qu’un incident grave fut, selon cette tradition, à l’origine de la conception de la Vierge Marie. Lors de la fête de la Dédicace, Saint Joachim vit en effet son offrande refusée au Temple par le Grand Prêtre, sous prétexte qu’il n’avait pas d’enfant (l’infertilité étant le signe d’une malédiction de la Loi). Saint Joachim se retira alors dans le désert auprès de ses bergers pour jeûner et prier, tandis que sainte Anne restait seule et priait, pendant la longue absence de son époux.

Or, la visite d’un ange du Seigneur vint annoncer successivement à saint Joachim et à sainte Anne, en une sorte de pré-Annonciation, que malgré leur âge avancé, ils allaient enfin mettre au monde un enfant, une fille, qui, elle-même, enfanterait le Sauveur.

La rencontre à la Porte dorée et la Conception de la Vierge Marie

Maître de la Divisio Apostolorum. Rencontre de Joachim et d'Anne à la Porte dorée v.1493

Les deux époux se retrouvèrent à la Porte d’or, à l’entrée de Jérusalem. Neuf mois plus tard, sainte Anne et saint Joachim devinrent les parents de la Vierge Marie. Cette Nativité de Marie est célébrée le 8 septembre dans la liturgie catholique, et on célèbre la Conception de sainte Anne dans la liturgie byzantine le 9 décembre, jour béni de la guérison de la stérilité du couple. La prière de sainte Anne et son exaucement, signe de la miséricorde de Dieu, a d’ailleurs exaltée dans une hymne de Georges Warda du XIIIès, chantée le 8 septembre dans la tradition chaldéenne.

La conception de la Vierge Marie

"Joachim et Anne, heureux soit votre couple ! Toute la création est votre débitrice. C’est par vous en effet qu’elle a offert au Créateur le don supérieur à tous les dons, une mère toute sainte, seule digne de Celui qui l’a créée. Heureux Joachim d’où sortit un germe tout immaculé, heureuse Anne dont le sein a développé lentement et d’où naquit une enfant toute sainte, la seule toujours vierge d’esprit, d’âme et de corps !"

Cet hommage, extrait de l’Homélie de Saint Jean Damascène sur la Nativité de la Vierge Marie, témoigne du respect qu’avaient les Pères de l’Église pour certains éléments des écrits apocryphes, puisqu’ils ont considéré l’histoire de saint Joachim et sainte Anne comme faisant partie intégrante du trésor de la tradition.

La longue stérilité de saint Joachim et sainte Anne est d’ailleurs interprétée par saint Jean Damascène, père de l’Église d’Orient et Docteur de l’Église, comme faisant partie du dessein divin : en effet, saint Jean Damascène explique que cette longue stérilité permit à Dieu de manifester Sa grâce, révélant ainsi que rien n’est impossible à Dieu (ce dont témoignent d’ailleurs les noms symboliques de saint Joachim et de sainte Anne).

La mystique et bienheureuse Anne-Catherine Emmerich (1774-1884) confirme dans ses écrits cette Conception exceptionnelle de la Vierge Marie par saint Joachim et sainte Anne.

Quoi qu’il en soit, la petite Marie fut conduite dès son plus jeune âge, selon la tradition liée aux apocryphes, au Temple de Jérusalem, pour y être éduquée par le grand prêtre Zacharie.

Sainte Anne serait morte à Jérusalem à l’âge de 67 ans, et les Orthodoxes célèbrent la Dormition de sainte Anne le 25 juillet. Sa dépouille, ainsi que celle de son époux, fut d’abord enterrée à Nazareth, dans le tombeau de ses parents, puis exhumée et transférée à Jérusalem. Le tombeau de sainte Anne et saint Joachim serait d’ailleurs situé sous l’ancienne basilique de sainte-Anne, à Jérusalem.

L’actuelle église sainte-Anne de Jérusalem. Berthold Werner. Commons Wikimédia.

La dévotion envers Sainte Anne

La dévotion envers sainte Anne connut de nombreuses péripéties et est naturellement intimement liée, en Occident comme en Orient, à la dévotion mariale et à l’histoire de l’Église. En témoigne le fait que la première fête de sainte Anne fut fêtée dans les premiers temps de l’Église le 8 décembre, jour qui est maintenant dédié à l’Immaculée Conception.

L’Église grecque byzantine fut la première à célébrer sainte Anne, trois fois dans l’année : sainte Anne seule le 26 juillet (Dormition de sainte Anne) ; sainte Anne avec saint Joachim, le 9 septembre et le 9 décembre, jours qui suivent la fête de l’Immaculée Conception et la Nativité de Marie.

Selon une tradition chrétienne orientale, la maison d’Akar, père de sainte Anne, se situerait à l’endroit actuel de la crypte de l'à Jérusalem, et serait le lieu de la naissance de la Vierge Marie.

Dès le VIès, on construisit une église dédiée à sainte Anne à Constantinople, et il est possible que la date du 26 juillet, à laquelle nous fêtons sainte Anne et saint Joachim, soit liée à la dédicace de cette première église.

La dévotion à sainte Anne se répandit très rapidement en Occident, surtout à partir du XIVès, grâce à la diffusion de la Légende dorée, mais aussi aux débats théologiques liés à l’Immaculée Conception, à la parenté du Christ et à la Nativité de la Vierge, qui eurent pour conséquence de lier de façon étroite la dévotion mariale de Marie Mère de Dieu (Theotokos)à celle de sainte Anne : en témoignent les représentations appelées « trinitaires », associant sainte Anne, la Vierge Marie et Jésus. Dès lors, très rapidement, la dévotion envers sainte Anne se développa en Italie (Rome, Bologne,Vidano), en Sicile (Palerme), en France (Apt, Auray) en Espagne (Séville), en Angleterre, en Pologne (Cracovie), en Allemagne (Düren), en Amérique (Canada) , en Asie (Bukit Mertajam, Malaisie) et jusqu’en Océanie (Nouméa, Nouvelle-Calédonie)... en France, c’est à Apt notamment en Provence, que la dévotion prit un grand essor.

La cathédrale Sainte-Anne d’Apt

Intérieur de la chapelle royale de la cathédrale d’Apt (diocèse d’Avignon). Digne, Public domain, via Wikimedia Commons.

La cathédrale Sainte-Anne conserve, depuis plus de dix-huit siècles, les plus importantes reliques de sainte Anne. D'après une tradition, sans doute légendaire, son corps fut apporté de Palestine par saint Lazare, premier évêque de Marseille, qui confia cette relique à saint Auspice, évêque d'Apt de 96 à 102. Pour le soustraire aux profanations, lors des persécutions, saint Auspice l'aurait enfermé dans une crypte souterraine où il serait demeuré ignoré pendant plusieurs siècles. Cette tradition est attestée par une lettre de Charlemagne au Pape Adrien 1ier, dont l’authenticité n’est pas établie, qui raconte qu’il fut retrouvé de façon miraculeuse en 770. La lettre rapporte que la cathédrale ayant, après sa profanation, fait l’objet d’une reconsacration, par l’évêque Turpin, on découvrit alors, en présence de Charlemagne, et pendant la messe, la crypte dans laquelle saint Auspice et les chrétiens persécutés se réfugiaient, et, dans un coffre, les reliques, qui furent identifiées comme celles de sainte Anne.

Quoi qu’il en soit, l'église d'Apt devint, à partir du VIII° siècle, un pèlerinage très renommé et fréquenté, y compris par de hautes autorités de l’Église et de l’État. De très nombreux ex-voto témoignent de la multitude des grâces reçues, et l'église d'Apt a distribué de nombreuses reliques de sainte Anne dans les différents sanctuaires qui lui sont dédiés.

À Apt, la fête de sainte Anne était célébrée le 26 juillet dès le XIIès. Le bienheureux pape Urbain V fit ajouter dans son Missel, dès 1370, une messe en l’honneur de sainte Anne. Cette messe fut étendue à toute l’Église en 1382, par le pape Urbain VI. C’est enfin le pape Sixte IV, partisan de la thèse de l’Immaculée Conception de Marie, qui fit ajouter au calendrier de l’Église romaine la fête solennelle de sainte Anne, au XVès...

En 1660, la reine de France Anne d’Autriche, épouse de Louis XIII, vint en personne en pèlerinage à Apt, remercier sa sainte patronne pour la naissance de son fils, Louis surnommé Dieudonné , futur Louis XIV. Cet événement majeur participa à la diffusion du culte de sainte Anne et donna lieu à la construction de la chapelle Sainte-Anne de la cathédrale d’Apt.

La cathédrale Sainte-Anne d’Apt fut classée au rang de basilique mineure en 1867 par Pie IX, quelques années après la proclamation officielle du dogme de l’Immaculée Conception, en 1854 (Ineffabilis Deus). Elle fut ensuite renommée de « basilique du prince des apôtres » le 9 décembre 1880 par celui que l'on nomme  ‘le pape du Rosaire’, Léon XIII.

La dévotion à sainte Anne est également très présente en Bretagne, puisqu’on y compte plus de 600 lieux de dévotion, plus ou moins importants, dédiés à sainte Anne, le plus important étant celui de sainte-Anne d’Auray , dans le Morbihan.

Le sanctuaire de sainte Anne d’Auray (diocèse de Vannes)

Sanctuaire de Sainte-Anne d’Auray. Vue d’ensemble. Jean-Christophe BENOIST, CC BY 4.0 , via Wikimedia Commons.

La basilique Sainte-Anne d’Auray est fréquentée par plus de 800.000 visiteurs et pèlerins par an, ce qui classe le sanctuaire au troisième rang des pèlerinages français. De nombreux pèlerins se réunissent notamment à l’occasion du grand pardon de sainte Anne, le 26 juillet, jour où l’on célèbre sainte Anne et saint Joachim.

On y fait mémoire de plusieurs apparitions de sainte Anne, la mère de la Vierge Marie, à Yves Nicolazic (1591-1645) entre septembre 1623 et mai 1645. Ces apparitions ont permis de faire renaître la dévotion envers sainte Anne qui existait autrefois en ce lieu, mais avait été peu à peu abandonnée. La chapelle demandée par sainte Anne au cours de cette apparition fut érigée, et la statue dont elle avait indiqué l’emplacement miraculeusement retrouvée. Cette apparition et les nombreux miracles qui se produisirent attirèrent bientôt des foules nombreuses de pèlerins: en témoignent les nombreux ex-voto.

La basilique contient notamment des reliques de sainte Anne provenant de la cathédrale d’Apt, offertes par le roi Louis XIII et la reine Anne d’Autriche en remerciement de la naissance du dauphin, après une stérilité de 22 ans.

La basilique conserve également des reliques du saint pape Jean-Paul II, qui s’était rendu à Auray en septembre 1996, au cours du voyage qu’il avait effectué pour la commemoration du baptême de Clovis, à Reims. Il avait célébré une messe devant 100.000 personnes, rappelant notamment la structure pascale du sacrement du mariage, à travers l’évocation de la figure de sainte Anne et saint Joachim, la nécessité de l’espérance et l’importance de la famille. Le saint pape

Scala santa. Sanctuaire de sainte Anne d’Auray. Jean-Christophe BENOIST, CC BY 4.0 , via Wikimedia Commons.

avait une grande dévotion envers sainte Anne, puisqu’il s’est rendu également au sanctuaire de sainte Anne-de-Beaupré au Canada.

Le sanctuaire d’Auray possède également une « Scala Santa ». La « Scala Santa » est l'escalier que Jésus monta en allant au prétoire de Pilate. Cet escalier, sanctifié par les pas du Sauveur, existe encore. On le vénère à Rome, face à la Basilique de Saint-Jean-de-Latran, en mémoire de la Passion.

L’usage se répandit peu à peu de construire des escaliers reproduisant exactement la Scala Santa de Rome, et l’on peut bénéficier, en en gravissant les marches tout en méditant la Passion du Christ, d’indulgences.

Le jubilé Sainte Anne aura lieu en 2025, pour célébrer le 400ème anniversaire des apparitions de sainte Anne, qui se sont déroulées entre 1623 et 1625, pour fêter celle que le saint pape Pie X appela, le 26 juillet 1914, la “patronne de la Bretagne”.

Sainte-Anne de Beaupré (Canada)

Façade de la basilique Sainte-Anne de Beaupré. Canada. Wilfredo Rafael Rodriguez Hernandez, CC0, via Wikimedia Commons.

Sainte Anne est la patronne civile et ecclésiastique du Canada. Le sanctuaire de sainte-Anne-de-Beaupré (Québec) a été créé au XVIIès à l’initiative de quelques marins bretons, rescapés d’une tempête après avoir prié sainte Anne. La basilique possède trois reliques de la sainte Mère de la Vierge Marie.

Dans la chapelle de la de la Grande Relique de la basilique actuelle, qui date de 1923, il est notamment possible de vénérer un bras-reliquaire, offert par le pape Jean XXIII en 1960. Cette relique de sainte Anne provient de la basilique Saint-Paul hors-les-murs, à Rome. Les deux autres reliques proviennent d’Apt.

Dans le transept Nord s’élève une statue monumentale de sainte Anne, considérée comme miraculeuse, qui a été sculptée en 1927 par Jules de Vischer à Bruxelles.

Le sanctuaire possède également, comme à sainte-Anne d’Auray, une scala santa, située à l’intérieur de l’édifice, à l’étage, et de nombreux ex-voto.

Le pape Jean-Paul II s’est également rendu à Sainte-Anne de Beaupré, lors de son voyage au Canada, le 9 septembre 1984.

La pratique de la dévotion envers sainte Anne, la mère de la Vierge Marie, et la grand-mère de Jésus est urgente en ces temps où la famille est vivement attaquée, jusque dans ses fondements. Et puisque la Vierge Marie est notre Mère, nous pouvons prendre également sainte Anne chez nous, à titre de grand-mère du ciel…nous pouvons ainsi l’associer aux prières à la Vierge Marie pour nos propres familles et toutes les familles. Cette dévotion peut se traduire par une prière ou une neuvaine à sainte Anne, la visite des sanctuaires dédiés à sainte Anne, etc.

La prière du Père Jean Thomas de Saint Cyrille

Le Père Jean Thomas de Saint Cyrille composa une prière de consécration à sainte Anne :

« Ô bienheureuse Anne, qui avez donné le jour â la Mère de Dieu et avez reçu la gloire insigne de devenir l'aïeule de notre Sauveur Jésus-Christ, je m'offre et me consacre entièrement à vous. Je recommande à votre maternelle sollicitude et à votre sainte garde mon corps et mon âme, les nécessités et les vicissitudes de mon existence, ma vie et ma mort. Je me propose et prends l'engagement de vous servir, de vous honorer par amour pour Marie votre fille très sainte, de défendre et de propager, selon mon pouvoir, votre glorieux patronage.

De votre côté, ô ma très douce Mère ? Ô ma patronne ! Daignez me recevoir au nombre de vos serviteurs et de vos fils adoptifs ; daignez m'attacher à vous par les liens de la plus tendre dévotion. Obtenez-moi d'imiter si parfaitement les vertus qui vous ont rendue agréable à Dieu, que je mérite les faveurs de Jésus et de Marie. Obtenez-moi une heureuse mort et qu'à ma dernière heure, mon âme reçoive vos consolations. Aidez-moi, durant ma vie, à mériter, par les souffrances, les mérites et les miséricordes de Notre-Seigneur Jésus-Christ, une rémission parfaite de mes péchés, que mon âme, en sortant de mon corps, puisse aller aussitôt vous rejoindre dans le repos éternel. Ainsi soit-il. »

Sainte Anne dans l’art

Sainte Anne est très souvent représentée dans l’art, selon différentes modalités: soit avec son époux Joachim, soit avec la Vierge Marie, soit avec la Vierge Marie et l’Enfant Jésus, dans une sorte de Sainte Famille dans laquelle  la fonction maternelle est particulièrement valorisée. Ces représentations sont liées aux épisodes de l’enfance de Marie. D’autres sont plus symboliques, et exaltent la figure de sainte Anne comme Mère de la Mère de Dieu (Theotokos) et grand-mère de Jésus. D’autres sont liées à ce qu’on appelle la Parenté de Jésus.

Motifs iconographiques liés à l’enfance de la Vierge Marie

La rencontre à la Porte dorée, ou Conception de la Vierge Marie

Lorenzo Monaco. Rencontre à la porte dorée de saint Joachim et sainte Anne, 1424. Église sainte Trinité , Florence.

Parmi les thèmes iconographiques de l’enfance de la Vierge Marie, celui de Sa Conception est lié à sainte Anne et st Joachim. Il se concrétise dans une représentation des retrouvailles des deux époux, après leur douloureuse séparation. On nomme traditionnellement la scène des retrouvailles ‘la rencontre de saint Joachim et sainte Anne à la Porte Dorée’ de Jérusalem. La porte Dorée se situe à l’entrée de Jérusalem. Dans la tradition juive, cette porte est celle par laquelle doit entrer le Messie. Elle a été close par Saladin, dans le dessein d’empêcher le Messie d’entrer.
Cette porte close est parfois mise en relation avec la porte close de la vision d’Ezéchiel (Ez. 44, 1-2) :

« Il me ramena vers la porte extérieure du sanctuaire, du côté de l’Orient. Mais elle était fermée.
Et l’Éternel me dit: Cette porte sera fermée, elle ne s’ouvrira point, et personne n’y passera; car l’Éternel, le Dieu d’Israël est entré par là. Elle restera fermée ».


La porte close peut également symboliser pour les Chrétiens la virginité de Marie, avant, pendant et après la naissance du Christ (en ce cas, elle rejoint le thème de l’Hortus conclusus, du jardin clos, qui symbolise également la Virginité de la Vierge Marie, lors de l’Annonciation.

Les retrouvailles du couple à la Porte dorée de Jérusalem sont représentées de plusieurs façons : parfois un simple geste de tendresse, une accolade amoureuse, ou, de façon plus réaliste, un baiser, qui prend une valeur éminemment symbolique, puisqu’il est assimilé à la Conception de la Vierge Marie. Cette représentation de la Conception de la Vierge Marie est fréquente dans l’art occidental, jusqu’au XVIès, le concile de Trente, comme l’explique Émile Mâle, ayant imposé des restrictions à la représentation des épisodes issus des apocryphes dans l’art de la Contre-réforme. Cette représentation de la Conception de Marie par la rencontre de saint Joachim et de sainte Anne a donc été peu à peu abandonnée, au profit d’une représentation de la Vierge Marie elle-même, en convertissant des représentations préexistantes, pour créer le type iconographique de l’Immaculée dans l’art.

Les plus célèbres représentations de ces retrouvailles de sainte Anne et saint Joachim à la Porte dorée sont celles des fresques de Giotto consacrées à la vie de sainte Anne et à l’enfance de Marie, qui se trouvent à Padoue, et celles de Lorenzo Monaco, datant du XVès (1424).

La Nativité de la Vierge Marie

Icône. Nativité de la Vierge Marie. Crypte de l’église Sainte-Anne de Jérusalem. Octave 444, CC BY-SA 4.0 , via Wikimedia Commons.

La naissance de Marie (Nativité de Marie), que l’on fête dans les Églises orientales et occidentales le 8 septembre, permet également de représenter sainte Anne.

 

P. di Giovanni Fei. Présentation de la Vierge Marie au Temple, v.1400.Public domain, via Wikimedia Commons.

La Présentation de Marie au Temple

Un autre motif iconographique dans lequel on retrouve sainte Anne et saint Joachim , parents de la Vierge Marie, est celui de sainte Anne et saint Joachim conduisant Marie au Temple (Présentation de Marie au Temple dans l’art.

Cet épisode est, lui aussi, tiré des récits apocryphes : le Protévangile de Jacques rapporte que sainte Anne avait fait vœu de consacrer son enfant à Dieu, selon la coutume du naziréat, et que saint Joachim et sainte Anne emmenèrent la petite Marie, alors âgée de trois ans, au Temple de Jérusalem pour qu’elle y soit élevée. La Présentation de Marie au Temple est célébrée dans la liturgie le 21 novembre  dans les différentes liturgies du monde, en Orient comme en Occident.

Représentations symboliques et légendaires de sainte Anne

Pour exalter la généalogie maternelle du Christ, ainsi que pour honorer la maternité de la Vierge Marie et de sainte Anne, le motif de sainte Anne, la Vierge et l'Enfant est apparu et a pris un essor considérable en Occident, à partir du XIVès jusqu’au XVIIès.

Sainte Anne trinitaire: sainte Anne portant la Vierge Marie sur ses genoux, portant elle-même l’Enfant Jésus. Sculpture en bois du XVès.

De nombreuses sculptures représentant sainte Anne portant la Vierge Marie portant elle-même l’Enfant Jésus sont apparues: ce thème iconographique , appelé Sainte Anne trinitaire, se développe à partir de l’accroissement de la dévotion envers sainte Anne[1], à partir du XIVès, et met en valeur la généalogie maternelle de Jésus.

Léonard de Vinci, La Vierge, l’Enfant Jésus et sainte Anne, vers 1508-1510. Crijam, Public domain, via Wikimedia Commons.

Le célèbre tableau de Léonard de Vinci, datant de 1509, intitulé La Vierge, l’Enfant et Sainte Anne est un exemple de l’évolution de ce thème à la Renaissance en Italie.

Le concile de Trente interdira cette représentation trinitaire de la Vierge à l’Enfant, afin de ne pas risquer d’établir une confusion avec la Trinité.

Sainte Anne apprenant à lire à la Vierge Marie. Église Saint-Pierre, Mont-Saint-Michel XV-XVIès.

Une autre figuration de sainte Anne éducatrice s’est développée pour développer le thème de l’enfance de la Vierge Marie: celui de sainte Anne Lui apprenant à lire.

Hans Thomann, Sainte Parenté (vers 1515). Hans Thoman, Public domain, via Wikimedia Commons

Enfin, il existe un thème iconographique lié à une légende, sans doute inventée par le bénédictin Haymon d'Auxerre: celui de la Sainte Parenté, qui représente la postérité légendaire des deux autres époux de sainte Anne (Cléophas et Salomas) après la mort de Joachim et leur descendance, soit 17 personnes en tout. On trouve de nombreuses représentations de la Sainte parenté en Europe du Nord et en Allemagne. Cette légende des triples époux sera rejetée par le Concile de Trente, et abandonnée dans l’art.