L’édifice spirituel (1P 2, 4-10)

L’édifice spirituel (1P 2, 4-10)

La première lettre de saint Pierre en quelques mots :

Les chrétiens sont dispersés parmi les païens, ils sont calomniés et doivent si possible calmer la calomnie en agissant bien jusqu'au jour où les païens auront les yeux ouverts. Les domestiques, en particulier, souffrent. Le Christ, dans sa Passion est passé par là, et il indique la voie du silence, de la non-violence. Dans la communauté fraternelle comme au dehors, les chrétiens sont appelés à bénir sans contre-violence (2, 11 à 3, 12).

Tous les chrétiens peuvent être amenés à souffrir pour leur foi et Pierre les exhorte à mettre à profit cette épreuve pour rendre compte de l'espérance chrétienne, par la parole (3, 15). Le Christ avant nous a mis à profit le passage pascal pour annoncer le salut aux plus durs de l'humanité, la génération du déluge (3, 18-22).

La vie communautaire est un signe prophétique, anticipant la fin de ce monde de violence et de débauche dont les chrétiens se différencient et souffrent.

La persécution provoque la manifestation de l'Esprit de gloire. Le Christ est le chef des pasteurs de la communauté, et tous, mutuellement soumis, se préparent à la gloire qui va être révélée (5, 1).

Approfondissons maintenant ce passage magnifique :

4 Approchez-vous de lui, la pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie, précieuse auprès de Dieu. 5 Vous-mêmes, comme pierres vivantes, prêtez-vous à l'édification d'un édifice spirituel [grec : oíkos pneumatikos], pour un sacerdoce saint, en vue d'offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus Christ.

6 Car il y a dans l'Ecriture: Voici que je pose en Sion une pierre angulaire, choisie, précieuse, et celui qui se confie en elle ne sera pas confondu. 7 A vous donc, les croyants, l'honneur, mais pour les incrédules, la pierre qu'ont rejetée les constructeurs, celle-là est devenue la tête de l'angle, 8 une pierre d'achoppement et un rocher qui fait tomber. Ils s'y heurtent parce qu'ils ne croient pas à la Parole; c'est bien à cela qu'ils ont été destinés.

9 Mais vous, vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation , un peuple acquis, pour proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, 10 vous qui jadis n'étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le Peuple de Dieu, qui n'obteniez pas miséricorde et qui maintenant avez obtenu miséricorde.

(1Pierre 2, 4-10)

Explication :

Le Christ est la pierre vivante parce qu'il est ressuscité. Le Ressuscité communique aux croyants d'être des pierres vivantes. (1P 2, 4-5)

Le Christ, pierre vivante, rejetée par les hommes, a du prix devant Dieu : « choisie » « précieuse auprès de Dieu ». Les chrétiens s'approchent de quelqu'un qui a été mis au rebut et, dans l'opinion commune, il y reste (en grec, pierre « rejetée » est un parfait passif). Le Christ a été considéré comme impropre à la construction d'une communauté humaine. Mais les croyants ne doivent pas se laisser impressionner. En s'approchant du Christ, ils entrent dans la construction dont Dieu est lui-même l'architecte. Le passif « vous êtes édifié » s'oppose à la prétendue autonomie des bâtisseurs qui ont commis la bévue formidable de rejeter rien de moins que la pierre angulaire. (1P 2, 6-8)

La « maison » sert souvent à désigner le Temple, mais elle désigne très souvent aussi la maisonnée, la famille.

Le temple messianique est en cours d'édification, c'est aussi la famille de Dieu, la communauté habitée par l'Esprit.

Dans cette maison « spirituelle » on offre des sacrifices « spirituels ». Pour ce culte, la communauté chrétienne exerce collectivement le sacerdoce de son propre sacrifice. (1P 2, 9-10). Il s'agit de l'offrande de toute l'existence, sanctifiée par l'Esprit (1P 1, 2). Il s'agit aussi d'un culte qui proclame les hauts faits de Dieu à la face du monde (1P 2, 9).

Actualisation :

Aujourd'hui, le concile Vatican II voit l'expression du sacerdoce commun du peuple de Dieu dans l'offrande de toute l'existence animée par l'Esprit Saint, le témoignage rendu à l'Evangile (Lumen gentium 10) et la participation active à la liturgie (La liturgie 14).

Avec Marie :

Plus que tous, Marie s'est approchée du Christ, y compris quand il fut rejeté, au pied de la croix, elle était debout. En s'approchant ainsi du Christ, pierre vivante, pierre angulaire, elle fait partie de la construction de la maison, du temple eschatologique, de la famille de Dieu. Avec les chrétiens, elle exerce le sacerdoce commun par son existence animée par l'Esprit Saint et son attitude offerte.


F. Breynaert.

Cf. Paul BONY, La première épître de Pierre, Cerf, Paris 2004, p. 75-96.