L'amour de Marie selon saint Alphonse de Liguori (1696-1787)

Le grand amour que Marie nous porte

Le premier motif du grand amour que Marie a pour les hommes, c'est le grand amour qu'elle a pour Dieu. Nous avons reçu ce commandement, dit saint Jean, que celui aime Dieu aime aussi son frère (1Jn 4, 21). Si donc, même parmi les esprits bienheureux, il ne s'en trouve aucun qui surpasse Marie en amour de Dieu, nous ne trouvons et ne pouvons trouver personne qui, après Dieu, nous aime plus que cette très aimante Mère.

Pourquoi encore notre céleste Mère nous chérit-elle à ce point ?

Parce que, au moment d'expirer, son bien-aimé Jésus nous recommanda à son affection maternelle. Nous l'avons vu, ce sont tous les hommes qu'il lui montrait en la personne de saint Jean quand il lui dit Femme voici votre fils (Jn 19, 26).

En outre, nous sommes des enfants excessivement chers à Marie, parce que nous lui avons coûté d'excessives douleurs. Les mères sont ainsi.

Dieu a tant aimé le monde qu'il donna son Fils unique (Jn 3, 16), lisons-nous dans saint Jean. Ces mêmes paroles, saint Bonaventure nous invite à les appliquer à Marie "Elle nous a tant aimés qu'elle donna son Fils unique"[1].

A la mort de Jésus-Christ se rattache un autre motif du grand amour de Marie à notre égard : elle voit que nous sommes le prix du sang versé par son Fils. Si on montrait à une mère un esclave qu'un de ses enfants, chéri entre tous, aurait racheté par vingt années de souffrances, de fatigues, de prison, à cette seule considération, quel cas ne ferait-elle pas de cet esclave ! Or, Marie le sait bien, si son fils est descendu sur terre, ce fut uniquement pour nous sauver, nous pauvres pécheurs, car, il l'a déclaré lui-même : Je suis venu chercher et sauver ce qui était perdu (Lc 19, 10).

Un jour saint Alphonse Rodriguez, de la Compagnie de Jésus, se trouvait devant une image de Marie, et, sentant son cœur brûler d'amour pour la très Vierge, ne put s'empêcher de lui dire : « Ma très aimable Mère, je sais bien que vous m'aimez, mais pas autant que je vous aime. » Alors Marie, comme offensée sur ce point délicat de son amour lui répondit de cette image : « Que dis-tu, Alphonse, que dis-tu ? Oh ! combien mon amour pour toi l'emporte sur ton amour pour moi ! Sache qu'il y a moins de distance de la terre au ciel que de ton amour au mien. »

Zaninus, Vita, II, 12.


[1] In I Sententiarum, dist 48


Saint Alphonse De Liguori, Les gloires de Marie I, 3

(éditions saint Paul, Paris 1987, p. 23-28),

synthèse F. Breynaert