Les noces de Dieu et de l'humanité (S. Augustin)

Noël ou les noces de Dieu et de l’humanité

Les noces de Dieu et de l’humanité, voilà comment saint Augustin, évêque d’Hippone au 5ème siècle, fêtait Noël !

Le Christ est Dieu qui s’unit véritablement à l’humanité sans rien perdre de sa divinité. Ce sont de vraies noces.

Extrait de l'homélie de saint Augustin :

«La Vérité aujourd’hui s’est élevée de terre ; le Christ est né de la chair.

Livrez-vous à une joie ; que ce jour attache vos esprits à la pensée du jour éternel, souhaitez, espérez fermement les biens célestes, et puisque vous en avez reçu le pouvoir, comptez devenir enfants de Dieu.

N’est-ce pas pour vous qu’est né dans le temps l’Auteur même des temps, pour vous que s’est montré au monde le Fondateur du monde, pour vous enfin que le Créateur est devenu créature ?

Pourquoi donc, ô mortels, mettre encore votre esprit dans ce qui est mortel ? pourquoi consacrer toutes vos forces à retenir, s’il était possible, une vie fugitive ? Ah ! de plus brillantes espérances rayonnent sur la terre, et ceux qui l’habitent n’ont reçu rien moins que la promesse de vivre dans les cieux.

Or, pour faire croire à cette promesse, une chose bien plus incroyable vient d’être donnée au monde.

Pour rendre les hommes des dieux, Dieu s’est fait homme ; sans rien perdre de ce qu’il était, il a voulu devenir ce qu’il avait fait ; oui, devenir ce qu’il a fait, unissant l’homme à Dieu, sans anéantir Dieu dans l’homme.

Nous sommes étonnés de voir une Vierge qui devient Mère ; il nous faut des efforts pour convaincre les incrédules de la réalité de cet enfantement tout nouveau, pour leur faire admettre qu’une femme a conçu sans le concours d’aucun homme ; qu’elle a donné le jour à un Enfant dont aucun mortel n’était le père ; enfin que le sceau sacré de sa virginité est resté inviolable au moment de la conception et au moment de l’enfantement.

La puissance de Dieu se montre ici merveilleuse ; mais sa miséricorde plus admirable encore, puisqu’à la puissance il a joint la volonté de naître ainsi.

Il était le Fils unique du Père, avant de devenir le Fils unique de sa mère ; lui-même l’avait formée, avant d’être formé dans son sein ; avec son père il est éternel, et avec sa Mère il est enfant d’un jour ; moins âgé que la Mère dont il est formé, il est antérieur à tout sans être formé de son Père ; sans lui le Père n’a jamais existé, et sa Mère n’existerait pas sans lui. [...]

Il était à craindre qu’on ne vint à mépriser la Vérité à cause qu’elle s’est élevée de terre, lorsque, semblable à l’époux qui sort du lit nuptial, elle s’est élancée du sein maternel où le Verbe de Dieu avait contracté avec la nature humaine une ineffable union.

Afin de détourner ces mépris, et pour empêcher que malgré sa naissance admirable, malgré ses paroles et ses oeuvres merveilleuses, la ressemblance de la chair du Christ avec la chair de péché ne fit voir en lui qu’un homme, après ces mots « Pareil à l’époux sortant du lit nuptial, il s’est élancé comme un géant pour fournir sa carrière », viennent aussitôt ceux-ci : «Il est parti d’une extrémité du ciel ».

Si donc, « la Vérité s’est « élevée de terre », c’était bonté de sa part, et non pas nécessité ; miséricorde, et non pas dénuement.

Pour s’élever de terre, cette Vérité est descendue des cieux ; pour sortir de son lit nuptial, l’Epoux s’est élancé d’une extrémité du ciel.

Voilà pourquoi il est né aujourd’hui.

Ce jour est le plus court des jours de la terre et c’est à dater de lui que les jours commencent à grandir. Ainsi Celui qui s’est rapetissé pour nous élever, a fait choix du jour qui est à la fois le moindre et le principe des grands jours.

En naissant ainsi et malgré son silence, il nous crie en quelque sorte avec une voix retentissante

que pour nous il s’est fait pauvre et qu’en lui nous devons apprendre à être riches;

que pour tous il s’est revêtu de la nature de son esclave et que nous devons en lui recouvrer la liberté;

que pour nous il s’est élevé de terre et que nous devons avec lui posséder le ciel


Saint Augustin, Sermon 192, pour le jour de Noël, Oeuvres de saint Augustin, tome 7, édition Guérin Bar le Duc, 1868. Extraits par F. Breynaert.

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