Mariotto Albertinelli, Annonciation, 1510


 

Le peintre de l’école de Florence de la haute Renaissance Mariotto di Bigio di Bindo Albertinelli ( 1474 - 1515) a peint de nombreuses fois l’événement de l’Annonciation. L’Annonciation dite de Florence, peinte en 1510 et conservée à la Galleria dell'Accademia de Florence, est remarquable à plusieurs titres et caractéristique de l’esthétique de la haute Renaissance italienne.

 

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Une perspective débordée

Ce qui est ici remarquable, c'est le fait que la perspective soit, comme le dit Daniel Arasse, « débordée ».

Il y a bien le dessin d'une architecture, mais d'une part, le sol n'est pas visible car le dessin est en contre-plongée, l'ange et la Vierge Marie sont devant, au premier plan, et donc en dehors de l'ordre mesurable de la perspective de cette architecture. Et d'autre part, Dieu le Père, les anges du ciel et la lumière éblouissante effacent les limites de la voûte.

Cet ensemble signifie que l'Incarnation déborde les réalités mesurables, les limites de nos constructions humaines. Que ce soit des constructions matérielles ou intellectuelles, le Christ les déborde : « il y a ici plus que Jonas... il y a ici plus que Salomon » (Mt 12, 38-42).

La nuée lumineuse

Le succès de cette œuvre s'explique par l'accord de ce thème avec la Bible.

L'Ancien testament évoque à plusieurs reprises Dieu sous forme de lumière éclatante ou de nuée. Dans le récit de saint Luc, l'ange annonce à Marie :

« L'Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre » (Luc 1, 35).

Cet effacement de l'architecture par la nuée lumineuse date de 1510, et se situe donc bien avant le sac de Rome et la crise luthérienne opposée à l'ostentation des richesses architecturales.

Ce n'est pas l'histoire qui crée le langage artistique, mais elle utilise éventuellement ce que l'histoire des arts propose. A partir des années 1530-1540, ce mode de représentation, c'est-à-dire avec une nuée lumineuse dans la partie haute, se diffuse à travers toute l'Italie.

Source :

-Daniel ARASSE, L'Annonciation italienne, Edition Hazan, Paris 1999, p 274-279

 

F. Breynaert et l’équipe de MDN.