1849 : s. Jean, s. Jean Baptiste, s. Pierre (Newman)

S. Jean, s. Jean Baptiste, s. Pierre (Newman 1849)

John Henri Newman (1801-1890) est anglican jusqu'en 1845, catholique ensuite.Sa quatrième conférence aux protestants et aux catholiques est une méditation sur la pureté et l'amour, avec l'exemple des saints Jean, Jean Baptiste et Pierre.

Jean :

Jean est « l'apôtre vierge [...] La prérogative spéciale de la chasteté lui fit trouver plus d'amour, parce qu'ayant été choisi par Notre-Seigneur, à cause de sa virginité, il resta vierge toute sa vie.

C'est celui qui, dans sa jeunesse, avait exprimé le désir de boire avec Notre Seigneur d'amertume[1].

C'est lui qui vécu longtemps dans un pays lointain, qui fut enfin mené à Rome, plongé dans de l'huile bouillante[2], et ensuite exilé sur une île lointaine[3] où il finit ses jours. »[4]

Jean et Jean le Baptiste :

Jean Baptiste « fut ermite dès son enfance, puis apôtre d'un peuple déchu, et enfin martyr. [...]

Oh ! Comment serait-il possible de concevoir dignement la sainteté de ces deux grands serviteurs de Dieu ! [...]

La grâce toute puissante de Dieu domina chez eux la révolte de la raison, la perversité des sentiments, le désordres des pensées, la fièvre des passions, les illusions des sens. Ils vécurent dans un monde à eux, uniforme, serein, calme ; ils vécurent dans des visions de paix, en communion avec le ciel, dans l'anticipation de la gloire.

S'ils parlèrent au monde au dehors en qualité d'apôtres ou de confesseurs, ils s'adressèrent à lui comme du fond d'un sanctuaire sacré, sans se mêler à lui, alors même qu'ils lui faisaient entendre leurs paroles ; c'était comme "une voix criant dans le désert". »[5]

Jean et Pierre :

« Celui qui a renié son Seigneur brille d'une manière toute spéciale par son amour pour lui. Cet amour de Jésus-Christ, débordant avec impétuosité et abondance en amour pour ses frères, le fit choisir comme premier pasteur du troupeau :

"Simon, fils de Jean, m'aimez-vous plus que ne font ceux-ci ?"

Notre Seigneur l'éprouva par cette question, et la récompense que lui valut sa réponse fut :

"Paissez mes agneaux, paissez mes brebis"[6].

On ose à peine le dire, mais l'apôtre que Jésus aimait fut surpassé en amour pour Jésus par un de ses frères qui ne brillait pas comme lui par la virginité, car ne n'est pas à Jean que Notre Seigneur adresse cette question, et fait cette réponse, mais à Pierre.

Un peu plus haut, dans le même récit, nous voyons encore les deux apôtres mis en contraste dans le caractère particulier dont ils brillaient.

Etant dans leur barque, et Notre Seigneur s'adressant à eux du bord du rivage, « ils ne savaient pas tout d'abord si c'était Jésus » qui leur parlait lorsque le disciple que Jésus aimait dit à Pierre « C'est le Seigneur. » Et tout à coup « Simon Pierre ayant ouï que c'était le Seigneur, mit son habit de dessus et se jeta à la mer » pour arriver plus vite à lui[7].

Saint Jean contemple et saint Pierre agit.[8]


[1] Newman fait allusion à Mc 10, 38-39.

[2] Cet épisode de l'huile bouillante n'est pas dans la Bible mais dans la tradition des pères de l'Eglise primitive : « Jean fut soumis par Domitien au supplice de l'huile bouillante. » (Tertullien, De Praescriptione Hereticorum 36-3)

[3] Newman fait allusion à l'île de PatmosJean écrivit l'Apocalypse. Il pense Jean auteur de l'Apocalypse, l'auteur de l'Evangile et le disciple Jean sont un seul personnage.

[4] J-H. Newman, Conférences adressées aux protestants et aux catholiques, « quatrième conférence : pureté et amour » ; trad. fr. des éditions Sagnier et Bray, Paris 1850, p. 79

[5] J-H. Newman, ibid., p. 80

[6] Jn 21, 15-17

[7] Newman paraphrase Jn 21, 7.

[8] P J-H. Newman, ibid., p. 87-88


Extraits par F. Breynaert de : J-H. Newman, Conférences adressées aux protestants et aux catholiques, « quatrième conférence : pureté et amour » ; traduction française des éditions Sagnier et Bray, Paris 1850, p. 79-88

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