Saint Carré (22) : Notre-Dame-de-Pitié

Vers 1660, Jean Bizien, journalier agricole, « voit la Vierge en songe », quatre nuits successives. A chaque fois, Notre Dame lui désigne un point précis d’un champ voisin et lui demande d’y creuser un trou. Jean n’obéit pas. La Vierge lui déclare en breton : « Pourquoi doutez-vous, homme de peu de foi ? Pourquoi ne voulez-vous pas m’écouter, moi qui vous ai donné tant de preuves de mon affection maternelle ? » A l’endroit indiqué en songe, Jean découvre une statue de Notre-Dame des Douleurs. Un sanctuaire est achevé en 1696.

Actualité du sanctuaire

C'est un lieu très fréquenté par les pèlerins. Il est certain qu'il en vient tous les ans un grand nombre de tous les environs, particulièrement aux fêtes de la Vierge, mais surtout à la Pentecôte. C'est le jour du pardon qui dure trois jours. Il commence le samedi par les vêpres, la procession des miracles et un feu de joie suivi d'un Te Deum.

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Plusieurs faits miraculeux ont été opérés par l'intercession de Notre Dame de St-Carré.

Ils sont recueillis et attestés par M. Francois Le Gall alors recteur de Lanvellec, qui en a été, pour ainsi dire, témoin.

Marie-Pauline Droniou, fille de Yves Droniou et Catherine Le Bastard, meuniers au Run, en Lanvellec, âgée (en 1809) de trois ans et quelques mois, tomba, dans le courant de février, dans le biez (bief) et fut emportée par le courant jusqu'à la chute de l'eau sur les tournants du moulin. Elle passe sous le canal, tombe sur les tournants, et est ainsi emportée par le courant environ trente pas plus loin. Ses parents s'apercevant de son absence se mettent à la chercher le long du biez supposant qu'elle pouvait y être tombée. Ils trouvent effectivement l'endroit par où elle avait glissé.

Alors la mère, tout éplorée, voue sa fille à Notre Dame de Pitié, promet diverses choses (elle les a toutes exécutées).

On trouve enfin l'enfant dans un endroit très profond. Elle a les yeux extrêmement gonflés et sortis de la tête. Elle paraît morte.

Elle revint enfin à la vie après avoir séjourné environ cinq quarts d'heure dans l'eau (attesté par le père qui a signé le registre de paroisse).

Toussaint Le Guern, fils de Jacques et de Marguerite Thos, de Lanvellec (en 1814 âgé de 11 ans) avait la mauvaise habitude de tirer la langue pour se moquer des parents qui le réprimandaient. Il eut la langue coupée dans une de ces circonstances ; la gangrène dévorant le reste de la langue, on fut obligé de la couper jusqu'aux racines.

Le médecin qui fit l'opération dit : "Je l'ai guéri, mais il est certain qu'il ne pourra plus articuler un seul mot" ; ce qui arriva en effet, car l'enfant ne se faisait comprendre que par signes.

A l'approche de la communion des enfants, cet enfant prend sa mère par le bras et lui fait signe de le suivre. Il la conduit ainsi, étonnée et surprise, de village en village, jusqu'à la chapelle de Saint Carré où étant arrivé il se mit à genoux devant la porte du frontispice et fait une courte prière puis il se lève, retrousse son pantalon, et fait à genoux le tour de la chapelle, suivi de sa mère qui n'y comprend rien. Arrivé à la porte d'où il était parti, il pria pendant un quart d'heure. Pendant ce temps, il est saisi d'inquiétude ; il lui semble sentir sa langue se gonfler dans sa bouche. Il se lève, et adressant la parole à sa mère lui dit : "Allons à présent à la maison !"

La mère étonnée s'écrie : "Mon enfant parle donc à présent ? - Oui, ma mère, par la grâce de Dieu et de la -Vierge". Ils se dirigent ensuite vers le presbytère - au bourg - racontent au Recteur ce qui s'est passé. Cet enfant fut admis à faire sa communion ; il reçut la Communion, le jour de pardon de Saint-Carré, dans la chapelle où il avait recouvré la parole, des mains de M. Prigent, curé de Plouaret, qui rédigea une instruction à ce sujet". (Arch. Côtes d'Armor, série T, enquête réalisée à la demande de Gaultier du Mottay).

A l'intérieur de la chapelle, l'on peut voir accrochés à l'une des poutres de la voûte, des chaînes et des fers qui selon la tradition ont une histoire bien émouvante.

Histoire qui se passe aux environs de 1800 dans le village de "Pavé-Dir" (aux limites de Plounévez-Moëdec, Plouaret, Vieux-Marché). Un homme fut assassiné, un suspect arrêté, et alors qu'on n'avait jamais pu établir contre lui une seule preuve, condamné par la cour d'Assises de Saint-Brieuc, aux travaux forcés à perpétuité.

Dans une misère effroyable, le malheureux implore la "Vierge de Saint-Carré", en lui promettant que s'il revoit les siens, d'entreprendre pieds nus le pèlerinage et d'offrir à la Vierge les chaînes et les fers qui lui meurtrissaient les chairs, jour et nuit.

Le miracle eu lieu. Avant de mourir, un homme du pays reconnaît devant témoins, que c'est lui le coupable du meurtre pour lequel un innocent a été durement condamné.

Le bagnard retrouve alors la liberté.

Il accomplira son vœux et la chapelle en garde le témoignage.

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Source : Patrick SBALCHIERO, « Saint Carré », dans : René LAURENTIN et Patrick SBALCHIERO, Dictionnaire encyclopédique des apparitions de la Vierge. Inventaire des origines à nos jours. Méthodologie, prosopopée, approche interdisciplinaire, Fayard, Paris 2007.