459 - Leçon sur les mauvaises amitiés (vendredi 10 août 29)

Evangiles

Pas de correspondance

Date

Vendredi 10 août 29

Lieu : 

Capharnaüm

 

Vision de Maria Valtorta :

459.1 « Dans la chambre du haut, il y a des hommes de Nazareth. Et hier, tes frères sont venus te chercher, puis des pharisiens et de nombreux malades. Et aussi quelqu’un d’Antioche, annonce Judas dès qu’il voit Jésus entrer dans la maison.

– Sont-ils donc repartis ?

– Non, celui d’Antioche est allé à Tibériade, mais il revient après le sabbat. Les malades sont répartis dans les maisons, et les pharisiens, en les entourant de beaucoup d’honneurs, ont voulu que tes frères soient présents. Ils sont tous les hôtes de Simon le pharisien.

– Oh ! la ! là !… gémit Pierre.

– Qu’est-ce que tu as ? Tu n’es pas content qu’ils honorent le Maître dans la personne de ses parents ? demande Judas.

– Oh ! s’il s’agit vraiment d’honneur et de rencontre utile… j’en suis très heureux !

– Se méfier, c’est juger. Le Maître ne veut pas que l’on juge.

– Mais oui ! Mais oui ! Pour être sûr, je vais attendre pour me faire une opinion. Ainsi, je ne serai ni naïf ni pécheur.

– Montons trouver les Nazaréens. Demain, nous irons voir les malades » dit Jésus.

Judas se tourne vers Jésus :

« Tu ne peux pas, c’est le sabbat. Veux-tu que les pharisiens te fassent des reproches ? Si tu ne penses pas à ton honneur, moi, j’y pense ! » lance très théâtralement Judas.

Puis il ajoute :

« Mais comme je comprends ton désir de guérir tout de suite ceux qui te cherchent, nous pouvons y aller nous-mêmes. Nous imposerons les mains en ton nom et…

Non. »

C’est un “ non ” tellement sec qu’il n’admet aucune discussion.

« Tu ne veux pas que nous accomplissions un miracle ? Tu veux le faire toi-même ? Eh bien… nous allons dire que tu es ici et que tu promets de les guérir. Ils seront déjà heureux…

– Ce n’est pas nécessaire. Les pêcheurs nous ont vus, on sait donc que je suis ici. Et ils savent bien que je guéris ceux qui ont foi en moi, puisqu’ils sont venus me chercher. »

Judas se tait, mécontent. Il a le visage fermé des mauvais jours.

459.2 Jésus sort sans se soucier de l’averse que l’orage précipite sur la terre, et il monte à la chambre du haut. Il pousse la porte et entre, suivi des apôtres. Les femmes sont déjà là, en discussion avec les Nazaréens. Dans un coin se trouve un homme qui m’est inconnu.

« Paix à vous.

– Maître ! »

Les Nazaréens s’inclinent, puis ils disent : “ Voici l’homme ”, en désignant l’inconnu.

« Viens ici, ordonne Jésus.

– Ne me maudis pas !

– Pour cela, il n’était pas nécessaire que je t’appelle ici. Tu n’as rien d’autre à dire au Sauveur ? »

Jésus est austère, mais en même temps encourageant.

L’homme le regarde… Puis il éclate en sanglots et crie en se jetant sur le sol :

« Si tu ne me pardonnes pas, je n’aurai pas de paix…

– Quand je voulais te rendre bon, pourquoi ne l’as-tu pas voulu ? Maintenant, c’est tard pour réparer. Ta mère est morte.

– Ah ! ne me dis pas cela. Tu es cruel !

– Non. Je suis la Vérité. J’étais la Vérité quand je te disais que tu allais tuer ta mère. Je le suis encore. A cette époque, tu te moquais de moi. Pourquoi me recherches-tu maintenant ? Ta mère est morte. Tu as péché, et tu as continué, tout en sachant ce que tu faisais. Je te l’avais dit. C’est là une grande faute : tu as voulu pécher en repoussant la Parole et l’Amour. Pourquoi te lamenter si, maintenant, tu n’as pas de paix ?

– Seigneur ! Seigneur ! Pitié ! J’étais fou et tu m’as guéri, j’ai espéré en toi, auparavant je désespérais de tous. Ne déçois pas mon espérance…

– Et pourquoi désespérais-tu?

– Parce que… j’ai fait mourir ma mère de douleur… Même le dernier soir… elle était à bout… et je n’ai pas eu pitié… Je l’ai frappée, Seigneur ! »

C’est un vrai cri de désespoir qui remplit la pièce.

« Je l’ai frappée !… Elle est morte dans la nuit !… Et elle m’avait seulement demandé d’être bon… Ma mère ! Je l’ai tuée…

– Il y a des années que tu l’as fait mourir, Samuel, à partir du moment où tu as cessé d’être un juste. Pauvre Esther ! Que de fois je l’ai vue pleurer ! Et quand elle me demandait une caresse de fils, à la place des tiennes… Et tu sais que ce n’était pas par amitié pour toi, qui es du même endroit[39] et du même âge que moi, mais par pitié pour elle que je venais chez toi… Je ne devrais pas te pardonner. Mais deux mères ont prié pour toi, et ton repentir est sincère. Je te pardonne donc. Par une vie honnête, efface du cœur de tes concitoyens le souvenir d’un Samuel pécheur, et retrouve ta mère. Tu le pourras si, par une vie de juste, tu conquiers le Ciel et ta mère avec lui. Mais rappelle-toi, rappelle-toi bien, que ton péché a été grand et que ta justice doit donc l’être dans la même proportion pour éteindre ta dette.

459.3 – Ah ! Que tu es bon ! Pas comme celui de tes disciples qui est sorti aussitôt après être rentré, et qui est venu à Nazareth seulement pour me terroriser ! Eux peuvent le confirmer. »

Jésus se retourne… Des apôtres, il manque uniquement Judas. C’est donc lui qui a maltraité Samuel. Que doit faire Jésus ? Pour éviter que l’on critique l’apôtre — comme apôtre sinon comme homme —, il dit :

« Tout homme ne peut qu’être sévère à cause de ton péché. Quand on fait le mal, il faudrait réfléchir au fait que les hommes jugent, penser qu’on leur en donne l’occasion … Mais n’aie pas de rancœur. La mortification que tu as reçue, mets-la comme expiation sur la balance de Dieu. Allons. Ici, les justes sont joyeux de ta rédemption. Tu es parmi des frères qui ne te méprisent pas. Car, si tout homme peut pécher, il n’est méprisable que lorsqu’il persiste dans le péché.

– Je te bénis, Seigneur. Je te demande pardon aussi pour toutes les fois où je t’ai méprisé… Je ne sais comment remercier… Tu sais ? La paix revient en moi. »

Il pleure maintenant calmement…

« Remercie ma Mère. Si tu es pardonné, si je t’ai guéri du délire pour te donner la possibilité du repentir, c’est grâce à elle. 459.4 Descendons. Le dîner est prêt et nous partagerons notre nourriture. »

Et il sort en tenant l’homme par la main.

En effet le repas est prêt, mais Judas n’est pas en bas non plus. Il n’est nulle part dans la maison. La maîtresse explique :

« Il est sorti. Il a dit : “ Je reviens tout de suite. ”

– C’est bien. Asseyons-nous et mangeons. »

Jésus offre la nourriture, la bénit et la partage. Mais une ombre glaciale est dans la pièce, éclairée par deux lampes et le foyer. Au-dehors, l’orage continue…

Judas revient, essoufflé, ruisselant comme s’il était tombé dans le lac. Bien qu’il ait relevé son manteau sur la tête, quand il le dépose tout mouillé à terre, ses cheveux paraissent raides et détrempés, collés aux joues, au cou. Tout le monde le regarde, mais personne ne parle.

Lui veut s’excuser bien que personne ne lui demande rien :

« J’ai couru chez tes frères pour leur dire que tu es ici. Je t’ai obéi, pourtant : je ne suis pas allé trouver les malades. D’ailleurs c’était impossible. Que d’eau ! Un vrai déluge !… Mais j’ai voulu sans tarder honorer ta famille… N’es-tu pas content, Maître ? Tu ne parles pas !…

– Je t’écoute. Prends et mange. 459.5 Et en attendant d’aller nous reposer, parlons entre nous.

Ecoutez : il est écrit[40] de ne pas confier son cœur à l’étranger parce que nous ne connaissons pas ses habitudes. Mais pouvons-nous dire que nous connaissons le cœur d’un autre, même s’il est notre compatriote ? Le cœur d’un ami, d’un parent ? Il n’y a que Dieu qui connaisse parfaitement le cœur de l’homme, et l’homme n’a qu’un moyen de connaître le cœur de son semblable et de comprendre s’il est vraiment son compatriote, ou bien son véritable ami et son vrai parent.

Quel est ce moyen ? Où se trouve-t-il ? Dans le prochain lui-même et en nous, dans ses actes et ses paroles, et dans le jugement droit que nous formons. Quand, dans les paroles du prochain, dans ses actes, ou dans les actions qu’il voudrait que nous fassions, nous nous rendons compte, par le jugement droit que nous formons, qu’il n’y a pas de bien, alors nous pouvons dire : “ II n’a pas le cœur bon, et je dois m’en méfier. ” Il faut le traiter avec charité, parce qu’il souffre du malheur le plus grave : avoir l’esprit malade. Mais il ne faut pas imiter ses actes, ni considérer ses paroles comme vraies et sages, et encore moins suivre ses conseils.

Ne laissez pas cette orgueilleuse pensée vous détruire : “ Moi, je suis fort et le mal des autres n’entre pas en moi. Je suis juste et je le reste, même si j’écoute ceux qui sont injustes. ”

L’homme est un abîme profond, et tous les éléments du bien et du mal sont en lui. Les premiers, les auxiliaires de Dieu, nous aident à grandir et à devenir rois ; les seconds, c’est-à-dire les passions et les mauvaises amitiés, peuvent devenir nuisibles à la vie de l’âme. Toutes les aspirations au bien et tous les germes du mal dorment en l’homme par la volonté aimante de Dieu, et par la volonté mauvaise de Satan qui suggestionne, qui tente, qui excite, alors que Dieu attire, réconforte, aime. Satan tente pour séduire. Dieu travaille pour conquérir. Et ce n’est pas toujours Dieu qui a la victoire, car la créature est lourde tant qu’elle ne fait pas de l’amour sa loi : à cause de sa pesanteur, elle descend et se laisse attirer plus facilement vers ce qui est assouvissement immédiat et par ce qu’il y a de plus bas en l’homme.

Par ce que je dis de la faiblesse humaine, vous pouvez comprendre combien il est nécessaire de se méfier de soi-même et de faire grandement attention à notre prochain, pour ne pas unir le venin d’une conscience impure à ce qui fermente déjà en nous. Quand on comprend qu’un ami est la ruine de notre cœur, quand ses paroles troublent la conscience, quand ses conseils scandalisent, il faut savoir rompre cette amitié nuisible. En y restant fidèle, on finirait par périr spirituellement, parce qu’on en viendrait à des actes qui éloignent Dieu, qui empêchent la conscience endurcie de comprendre les inspirations de Dieu.

Si un homme coupable de péchés graves pouvait, voulait parler, pour expliquer comment il en est venu à de telles fautes, on verrait qu’à l’origine il y a eu une amitié mauvaise…

– C’est vrai ! reconnaît à voix basse Samuel de Nazareth.

459.6 – Méfiez-vous de ceux qui, après vous avoir combattu sans raison, vous comblent tout à coup d’honneurs et de cadeaux.

Méfiez-vous de ceux qui louent toutes vos actions et sont prêts à tous les éloges : en d’autres termes, ils louent le paresseux comme étant un bon travailleur, l’adultère comme étant un mari fidèle, le voleur comme étant honnête, le brutal comme étant un homme doux, le menteur comme étant sincère, le mauvais fidèle et le pire des disciples comme étant des modèles. Ils le font pour vous détruire et se servent de votre ruine pour leurs mauvais projets.

Fuyez ceux qui veulent vous enivrer d’éloges et de promesses, pour vous faire commettre des actes que vous n’accepteriez pas de faire si vous n’étiez pas ivres.

Et quand vous avez juré fidélité à quelqu’un, évitez de traiter avec ses ennemis ; ils ne peuvent vous fréquenter que pour nuire à celui qu’ils haïssent, et cela avec votre aide même.

Ouvrez les yeux. J’ai dit[41] : soyez simples comme des colombes, mais en même temps rusés comme des serpents. Car, pour traiter de questions spirituelles, la simplicité est sainte, mais pour vivre dans le monde sans se nuire à soi-même et à ses amis, il faut une ruse qui sache découvrir les fourberies de ceux qui haïssent les saints. Le monde est un nid de serpents. Sachez connaître le monde et ses combinaisons. Et puis, en restant des colombes, pas dans la boue où restent les serpents, mais à l’abri, en haut du rocher, ayez le cœur simple des enfants de Dieu. Et priez, priez car, en vérité je vous le dis, le grand Serpent siffle autour de vous : vous êtes en grand danger et celui qui ne veille pas, périra. 459.7Oui. Parmi les disciples, il y en aura qui périront, pour la plus grande joie de Satan et l’infinie douleur du Christ.

– Qui donc, Seigneur ? Peut-être pas l’un des nôtres, un prosélyte, quelqu’un… qui n’est pas originaire de Palestine, ou qui…

– Ne cherchez pas. N’est-il donc pas écrit[42] que l’abomination entrera, comme elle l’a déjà fait, dans le lieu saint ? Or, si on peut pécher même près du Saint, est-ce que l’un de mes disciples ne pourra pas pécher, qu’il soit Galiléen ou Judéen ? Veillez, veillez, mes amis. Veillez sur vous-mêmes et sur les autres, veillez à ce que vous disent les autres et à ce que vous dit votre conscience. Et si par vous-mêmes vous n’avez pas la lumière pour voir clair, venez à moi. Je suis la Lumière. »

Pierre s’agite et chuchote derrière le dos de Jean qui fait des signes de dénégation. Jésus tourne vers lui son regard, le voit… Pierre se donne une contenance et fait mine de s’éloigner. Jésus se lève, sourit légèrement… Puis il entonne la prière, bénit, prend congé. Il reste seul pour prier encore.

 

[39] du même endroit : c’est nous qui rectifions. Par distraction probablement, Maria Valtorta avait écrit : contemporain et du même âge. A l’intérieur de la couverture du quatrième cahier autographe, qui comprend les chapitres 453 à 459, elle a noté : Je vous prie de m’excuser si ce cahier est particulièrement mal écrit. Ce sont des épisodes que j’ai vus alors que j’étais entre la vie et la mort après ce funeste 2 juillet 1946… Je l’ai écrit couchée, avec une forte fièvre… et d’atroces douleurs… Cela explique aussi l’indécision que nous avons signalée en note en 457.2. La raison du funeste 2 juillet 1946 se trouve en 454.8. D’autres malaises de l’écrivain sont attestés en 54.9, 113.1, 131.6, 154.9, 165.11, 215.7 (en note), 227.1, 230.1, 361.1, 402.1, 456.1 (passage entre parenthèses), 487.2 (en note), 515.6 (dernières lignes), 574.4 (en note), 590.4, 634.18. La différente manière de recevoir les “ visions ” et les “ dictées ” est expliquée en 3.1, 21.7, 361.1.

[40] il est écrit : en Si 8, 18-19.

[41] J’ai dit, en 265.7.

[42] N’est-il donc pas écrit, en Dn 9, 27 ; 11, 31 ; 12, 11.