515 - Les raisons de la souffrance salvifique de Jésus (vendredi 19 octobre 29)

Evangiles

Pas de correspondance

Date

Vendredi 19 octobre 29

Lieu : 

Gabaon

 

Vision de Maria Valtorta :

515.1 Jésus ne peut rester longtemps plongé dans ses pensées. Jean et son cousin Jacques, puis Pierre avec Simon le Zélote le rejoignent pour attirer son attention sur le panorama que l’on découvre du haut de la colline. Et peut-être dans l’intention de le distraire, car il est visiblement très triste, ils rappellent les événements survenus dans les régions qui se présentent sous leurs yeux : le voyage vers Ascalon… la maison des paysans de la plaine de Saron où Jésus rendit la vue au vieux père de Gamla et Jacob… la retraite au mont Carmel de Jésus et de Jacques… Césarée maritime et la jeune Auréa Galla… la rencontre avec Syntica… les païens de Joppé… les voleurs près de Modin… le miracle des moissons dans la maison de Joseph d’Arimathie… la vieille femme glaneuse…

Oui, toutes choses qui voudraient réjouir… mais auxquelles, pour tous ou pour lui seul, se mêlent des larmes et un souvenir de douleur. Les apôtres eux-mêmes s’en aperçoivent et murmurent :

« Vraiment, en toute chose sur cette terre, il se trouve une part de souffrance. C’est un lieu d’expiation… »

Mais justement André, qui s’est joint au groupe avec Jacques, fils de Zébédée, observe lui aussi :

« C’est une loi juste pour nous, qui sommes pécheurs. Mais pour lui, pourquoi tant de souffrance ? »

Il s’élève une discussion paisible — et qui le reste, même quand, attirés par les voix des premiers, tous les autres s’unissent au groupe —. Judas est le seul à ne pas s’y joindre : il s’affaire au milieu des humbles, qu’il instruit en imitant la voix, les gestes, la pensée du Maître ; mais c’est une imitation théâtrale, pompeuse, à laquelle il manque la chaleur de la conviction, et ses auditeurs le lui disent sans périphrases. Cela énerve Judas, qui leur reproche d’être bouchés et de ne rien comprendre. Et il leur déclare qu’il les quitte, car “ ce n’est pas la peine de jeter aux pourceaux les perles de la sagesse ”. Il s’arrête cependant, car les humbles gens, vexés, le prient d’être compatissant en s’avouant “ inférieurs à lui comme un animal est inférieur à un homme. ”…

Jésus est distrait de ce que disent autour de lui les Onze, car il écoute Judas, et ce qu’il entend ne le réjouit certainement pas… Mais il soupire et se tait 515.2 jusqu’au moment où Barthélemy l’intéresse directement à la discussion en lui soumettant les divers points de vue sur la raison pour laquelle lui, qui est indemne du péché, doit souffrir.

Barthélemy dit :

« Je soutiens que cela arrive parce que l’homme déteste celui qui est bon. Je parle de l’homme coupable, c’est-à-dire de la majorité. Cette majorité se rend compte que, par comparaison avec celui qui est sans péché, sa culpabilité ressort davantage, avec ses vices, et, par dépit, il se venge en faisant souffrir le bon.

– Pour ma part, je suis sûr que tu souffres du contraste entre ta perfection et notre misère. Même si personne ne te méprisait d’aucune façon, tu souffrirais pareillement, car ta perfection doit éprouver un dégoût douloureux pour les péchés des hommes, intervient Jude.

– Moi, au contraire, je pense que, n’étant pas exempt de l’humanité, tu souffres de l’effort de devoir retenir, par ta partie surnaturelle, les révoltes de ton humanité contre tes ennemis, estime Matthieu.

– Et moi, je vais sûrement me tromper, car je suis un sot, je dis que tu souffres au contraire de voir ton amour repoussé. Tu ne souffres pas de ne pas pouvoir punir comme le côté humain peut le désirer, mais tu souffres de ne pouvoir faire du bien comme tu le voudrais, expose André.

– Moi, enfin, dit Simon le Zélote, je pense que tu souffres, parce que tu dois subir toute douleur pour racheter toute douleur. Il n’y a pas en toi l’une des deux natures qui prédomine, mais toutes deux sont pareillement en toi, unies en un parfait équilibre, pour former la Victime parfaite, tellement surnaturelle qu’elle peut avoir la force d’apaiser l’offense faite à la Divinité, tellement humaine qu’elle peut représenter l’humanité et la ramener à l’état immaculé du premier Adam pour effacer le passé et engendrer une humanité nouvelle, recréer une humanité nouvelle conforme à la pensée de Dieu, c’est-à-dire une humanité où existe réellement l’image de Dieu et sa ressemblance avec lui, ainsi que la destinée de l’homme : la possession, le pouvoir d’aspirer à la possession de Dieu, dans son Royaume. Tu dois souffrir surnaturellement, et tu souffres, de tout ce que tu vois faire et de ce qui t’entoure, pourrais-je dire, dans une perpétuelle offense à Dieu. Tu dois souffrir humainement, et tu souffres, pour arracher la luxure de notre chair empoisonnée par Satan. C’est par la souffrance complète des deux natures parfaites que tu annuleras complètement l’offense faite à Dieu, la faute de l’homme. »

Les autres se taisent. Jésus les interroge :

« Et vous, vous ne dites rien ? Quelle est d’après vous la plus juste définition ? »

Les uns se prononcent pour l’une, les autres pour une autre. Seul Jacques, fils d’Alphée, se tait avec Jean.

« Et vous deux, vous n’en approuvez aucune ? dit Jésus pour piquer leur intérêt.

– Non, nous trouvons en toutes une part de vérité, parfois beaucoup. Mais nous sentons aussi qu’il manque ce qu’il y a de plus vrai.

– Et vous ne savez pas le trouver ?

– Nous l’aurions peut-être trouvé, mais il nous paraît presque blasphémer de le dire, car… Nous sommes de bons Israélites, et nous craignons Dieu, presque au point de ne pouvoir prononcer son nom. Et de penser que, si l’homme du peuple élu, l’homme fils de Dieu ne peut pour ainsi dire prononcer le nom béni et crée des termes de remplacement pour nommer son Dieu, il nous paraît blasphématoire de penser que Satan puisse oser nuire à Dieu. Et pourtant, nous nous rendons compte que la douleur ne cesse d’agir envers toi parce que tu es Dieu et que Satan te hait. Il te hait comme nul autre. Tu trouves la haine, mon Frère, parce que tu es Dieu, explique Jacques.

– Oui, approuve Jean. Tu trouves la haine parce que tu es l’Amour. Ce ne sont pas les pharisiens ou les rabbins qui se dressent pour te faire souffrir, ce n’est pas celui-ci ou celui-là, ni pour telle ou telle raison. C’est la Haine qui pénètre les hommes et les dresse contre toi, blêmes de haine, parce que par ton amour, tu arraches trop de proies à la Haine.

– Il manque encore quelque chose à ces nombreuses définitions. Cherchez la raison la plus vraie. Celle pour laquelle j’existe… » dit Jésus pour les encourager.

Mais personne ne trouve. Ils réfléchissent longuement, puis renoncent :

« Nous ne trouvons pas…

– Elle est si simple… Elle est toujours devant vous. Elle résonne dans les paroles de nos livres, dans les figures de notre histoire… Allons, cherchez ! Dans toutes vos définitions, il y a du vrai, mais il manque la raison première. Cherchez-la, non pas dans le présent, mais dans le passé le plus lointain, au-delà des prophètes, au-delà des patriarches, au-delà de la création de l’Univers… »

Les apôtres réfléchissent… mais en vain. Jésus sourit. Puis il reprend :

« Et pourtant, si vous vous rappeliez mes paroles, vous trouveriez la raison. Mais vous ne pouvez encore tout vous rappeler. Un jour, vous vous souviendrez.

515.3 Ecoutez : remontons ensemble le cours des siècles, jusqu’aux limites du temps. Vous savez qui a corrompu l’esprit de l’homme. C’est Satan, le Serpent, l’Adversaire, l’Ennemi, la Haine. Appelez-le comme vous voulez. Mais pourquoi l’a-t-il corrompu ? Parce qu’il était très envieux, en voyant l’homme destiné au Ciel d’où lui-même avait été chassé. Il a voulu que l’homme subisse l’exil que lui-même connaît. Pourquoi avait-il été chassé ? Parce qu’il s’est révolté contre Dieu, vous le savez. Mais en quoi ? Cela concernait l’obéissance. Au commencement de la douleur, il y a une désobéissance. Dans ce cas, n’est-il pas nécessairement logique que pour rétablir l’ordre, qui est toujours joie, il doit y avoir une obéissance parfaite ? Obéir est difficile, surtout si c’est en matière grave. Ce qui est difficile fait souffrir celui qui l’accomplit. Réfléchissez donc : moi, à qui l’Amour a demandé si je voulais ramener la joie aux enfants de Dieu, je dois souffrir infiniment pour accomplir l’obéissance à la Pensée de Dieu. Je dois donc souffrir pour vaincre, pour effacer non pas un ou mille péchés, mais le Péché lui-même par excellence, qui dans l’esprit angélique de Lucifer ou dans celui qui animait Adam, a été et sera toujours, jusqu’au dernier homme, un péché de désobéissance à Dieu.

Pour vous, les hommes, votre obéissance doit se limiter à ce peu — qui vous paraît si grand, mais qui est si peu — que Dieu vous demande. Dans sa justice, il n’exige rien de vous que vous ne puissiez donner. Vous ne connaissez des volontés de Dieu que ce que vous pouvez accomplir.

Mais moi, je connais sa Pensée tout entière, au sujet de tous événements, les grands et les plus petits. Pour moi, il n’est pas de limites à la connaissance et à l’exécution. L’amoureux Sacrificateur, l’Abraham divin, n’épargne pas la Victime et son Fils. C’est l’Amour inassouvi et offensé qui exige réparation et offrande. Et même si je vivais des milliers d’années, ce ne serait rien si je ne consumais pas l’Homme jusqu’à sa dernière fibre, de même que rien n’aurait existé si de toute éternité je n’avais pas dit “ oui ” à mon Père, en me disposant à obéir, et comme Dieu Fils et comme Homme, au moment que mon Père trouverait juste.

L’obéissance est souffrance et elle est gloire. L’obéissance, comme l’âme, ne meurt jamais. En vérité, je vous dis que les vrais obéissants deviendront des dieux, mais après une lutte continuelle contre eux-mêmes, contre le monde, contre Satan. L’obéissance est lumière : plus on obéit, plus on est éclairé et mieux on voit. L’obéissance est patience : plus on obéit, mieux on supporte les fardeaux et les personnes. L’obéissance est humilité, et plus on la pratique, plus on est humble avec le prochain. L’obéissance est charité, car elle est un acte d’amour, et plus on s’y soumet, plus nos faits et gestes sont nombreux et parfaits. L’obéissance est héroïsme. Et un héros dans l’ordre spirituel, c’est un saint, le citoyen des Cieux, l’homme divinisé. Si la charité est la vertu où l’on retrouve le Dieu un et trine, l’obéissance est la vertu où l’on me trouve, moi, votre Maître. Faites en sorte que le monde vous reconnaisse pour mes disciples par une obéissance absolue à tout ce qui est saint.

515.4 Appelez Judas. J’ai quelque chose à dire, à lui aussi… »

Judas accourt. Jésus montre le panorama qui se rétrécit au fur et à mesure de la descente :

« Une petite parabole pour vous, futurs maîtres des âmes. Vous y verrez d’autant plus clair que vous gravirez davantage le chemin de la perfection, qui est ardu et pénible. Tout d’abord, nous admirions les deux plaines des Philistins et de Saron avec de nombreux villages, des champs et des vergers et jusqu’à un azur lointain qui était la grande mer, et le mont Carmel tout vert là-bas, au fond. Maintenant, nous ne voyons plus que peu de choses. L’horizon s’est rétréci et il ne cessera de se rétrécir jusqu’à disparaître au fond de la vallée. C’est exactement ce qui arrive à celui dont l’âme descend au lieu de s’élever : sa vertu et sa sagesse se font toujours plus limitées, son jugement toujours plus borné jusqu’à s’anéantir. Alors un maître spirituel est mort pour sa mission. Il ne discerne plus et ne peut plus conduire. C’est un cadavre, et il peut corrompre comme il s’est corrompu. La descente l’entraîne parfois — presque toujours —, parce qu’il trouve en bas des satisfactions sensuelles. Nous aussi, nous descendons dans la vallée pour trouver repos et nourriture, mais si cela est nécessaire à notre corps, il n’est pas nécessaire de satisfaire l’appétit sensuel et la paresse de l’âme, en descendant dans les vallées de la sensualité morale et spirituelle. Il n’y a qu’une seule vallée à laquelle il soit permis d’accéder, c’est celle de l’humilité, parce que Dieu lui-même y descend afin de saisir l’âme humble pour l’élever vers lui. Celui qui s’humilie sera exalté. Toute autre vallée est mortelle, car elle éloigne du Ciel.

– C’est pour cela que tu m’as appelé, Maître ?

– En effet. Tu as beaucoup parlé avec ceux qui te questionnaient.

– Oui, et ce n’était pas la peine. Ils ont l’intelligence plus dure que celle des mulets.

– Mais moi, j’ai voulu déposer une pensée là où tout est sorti. Pour que tu puisses nourrir ton âme. »

Judas le regarde, interdit. Il ne sait si c’est un don ou un reproche. Les autres qui n’avaient pas remarqué l’entretien de Judas avec ceux qui les suivaient, ne comprennent pas que Jésus reproche à Judas son orgueil.

515.5 Judas préfère amener prudemment la conversation dans une autre direction :

« Maître, qu’en penses-tu ? Ces Romains, comme l’homme de Pétra, pourront-ils arriver un jour à ta doctrine, eux qui ont eu un contact si limité avec toi ? Et cet Alexandre ? Il est parti… Nous ne le verrons plus, tout comme ces derniers, d’ailleurs. Il semble y avoir en eux une recherche instinctive de la vérité, mais ils sont plongés jusqu’au cou dans le paganisme. Réussiront-ils jamais à conclure quelque chose de bon ?

– Tu veux dire à trouver la Vérité ?

– Oui, Maître.

– Et pourquoi ne devraient-ils pas y parvenir ?

– Parce que ce sont des pécheurs.

– N’y a-t-il qu’eux de pécheurs ? N’y en a-t-il pas parmi nous ?

– Beaucoup, je l’admets. Mais justement, je me dis que si nous, qui sommes déjà nourris de sagesse et de vérité depuis des siècles, nous restons pécheurs et n’arrivons pas à devenir justes et à suivre la Vérité que, toi, tu représentes, comment pourront-ils le faire, eux, saturés d’impuretés comme ils le sont ?

– Tout homme peut arriver à atteindre et à posséder la Vérité, c’est-à-dire Dieu, quel que soit son point de départ. Quand il n’y a pas d’orgueil de l’esprit et de dépravation de la chair, mais sincère recherche de la Vérité et de la Lumière, pureté d’intention et désir de Dieu, une créature est sûrement sur le chemin de Dieu.

– Orgueil de l’esprit… et dépravation de la chair… Maître… alors…

– Développe ta pensée, elle est bonne. »

Judas tergiverse, puis il dit :

« Alors ils ne peuvent atteindre Dieu, car ce sont des dépravés.

– Ce n’est pas cela que tu voulais dire, Judas. Pourquoi as-tu bâillonné ta pensée et ta conscience ? Ah ! Comme il est difficile à l’homme de s’élever vers Dieu ! Et le plus grand obstacle se trouve en lui-même, qui ne veut pas réfléchir sur lui-même et reconnaître ses défauts. Vraiment, on calomnie bien souvent Satan, en lui attribuant toute cause de ruine spirituelle. Et l’on calomnie encore davantage Dieu en lui attribuant tous les événements. Dieu ne viole pas la liberté de l’homme. Satan ne peut l’emporter sur une volonté affermie dans le bien. En vérité, je vous dis que soixante-dix fois sur cent, l’homme pèche par sa propre volonté. Et — on ne le pense pas, mais il en est ainsi — il ne se relève pas de son péché parce qu’il se refuse à s’examiner, et même si sa conscience, par un mouvement imprévu, se dresse en lui et crie la vérité qu’il n’a pas voulu méditer, l’homme étouffe ce cri, anéantit cette représentation qui se dresse devant son intelligence sévère et affligée, s’efforce d’altérer sa pensée suggestionnée par la voix accusatrice, et se refuse à dire par exemple : “ Mais alors nous, moi, nous ne pouvons atteindre la Vérité parce que nous avons l’orgueil de l’esprit et la corruption de la chair. ” Oui, en vérité, si l’on n’avance pas vers la voie de Dieu, c’est que, parmi nous il y a l’orgueil de l’esprit et la corruption de la chair : un orgueil vraiment émule de celui de Satan, au point de juger ou d’entraver les actions de Dieu quand elles sont contraires aux intérêts des hommes ou des partis. Et ce péché fera, de nombreux Israélites, des damnés éternels.

– Nous ne sommes pas tous comme ça, pourtant.

– Non. Il y a encore des âmes bonnes, dans toutes les classes sociales. Elles sont plus nombreuses chez les humbles gens du peuple, que parmi les savants et les riches. On en trouve, certes, mais combien ? Combien, par rapport à ce peuple de Palestine que, depuis presque trois années, j’évangélise et comble de bienfaits, et pour lequel je m’épuise ? Il y a, en Israël, plus d’étoiles dans une nuit assombrie par les nuages que d’âmes résolues à entrer dans mon Royaume.

– Et les païens, ces païens-là, y entreront ?

– Pas tous, mais beaucoup. Et aussi parmi mes disciples eux-mêmes, tous ne persévéreront pas jusqu’à la fin. Mais ne nous préoccupons pas des fruits pourris qui tombent de la branche ! Cherchons, tant que c’est possible, à les empêcher de pourrir au moyen de la douceur, de la fermeté, des reproches et du pardon, de la patience et de la charité. Puis, quand ils disent “ non ” à Dieu et aux frères qui veulent les sauver, et quand ils se jettent dans les bras de la Mort, de Satan, en mourant impénitents, baissons la tête et offrons à Dieu notre souffrance de n’avoir pu donner la joie du salut de cette âme. Tout maître connaît de telles défaites. D’ailleurs, elles servent à abaisser l’orgueil des maîtres spirituels et à éprouver leur constance dans le ministère. La défaite ne doit pas lasser la volonté de l’éducateur spirituel, mais au contraire le pousser à faire davantage et mieux à l’avenir.

– Pourquoi as-tu dit au décurion que tu le reverrais sur un mont ? Comment fais-tu pour savoir cela ? »

Jésus porte sur Judas un long regard étrange, dans lequel la tristesse se mêle au sourire, avant de répondre :

« Parce qu’il sera l’un de ceux qui seront présents à mon élévation, et il dira au grand docteur d’Israël une sévère parole de vérité. Et à partir de ce moment-là, il commencera sa marche assurée vers la lumière. Mais nous voici à Gabaon. Que Pierre aille avec sept autres annoncer ma présence. Je parlerai sur-le-champ pour congédier les habitants des villages voisins qui me suivent. Les autres resteront avec moi jusqu’après le sabbat. Quant à toi, Judas, reste avec Matthieu, Simon et Barthélemy. »

(Je n’ai pas reconnu dans le décurion[40] l’un des soldats présents à la crucifixion. Mais je dois reconnaître que, absorbée comme je l’étais par l’observation attentive de mon Jésus, je ne les ai pas beaucoup examinés. Pour moi, c’était un groupe de soldats préposés au service, rien de plus. En outre, au moment où j’aurais mieux pu les regarder parce que “ tout était accompli ”, il y avait une lumière si faible que je n’aurais pu reconnaître que les visages que je vois souvent. Je pense pourtant, d’après les paroles de Jésus, que c’est le soldat qui a dit à Gamaliel des mots dont je ne me souviens pas, et que je ne puis contrôler parce que je suis seule ; et je n’ai personne pour me donner le cahier de la Passion.)

 

[40] le décurion est le chef d’une manipule romaine, ou gradé, rencontré en 514.7/9 ; absorbée comme je l’étais par l’observation attentive de mon Jésus : il s’agit de la scène de la crucifixion, écrite auparavant (le 27 mars 1945) mais placée plus loin, au chapitre 609.